Non à l’intervention en Syrie, non au néocolonialisme français

mis en ligne le 25 septembre 2013
L’opinion publique internationale fait en ce moment l’objet d’un matraquage médiatique sans précédent destiné à la convaincre de la légitimité d’une attaque contre le régime de Bachar al-Assad en Syrie. Le prétexte d’une telle intervention est l’usage de gaz toxiques dont aucune enquête pour l’instant n’a fourni la preuve qu’elle a été ordonnée par le gouvernement syrien.
Rappelons-nous les « armes de destruction massive » irakiennes que personne n’a jamais réussi à trouver.
Les États soumis au pouvoir des grandes multinationales bafouent la légalité juridique qu’ils ont eux-mêmes instituée, puisqu’ils veulent engager les attaques sans avoir consulté les Nations unies. Le président français dispose du pouvoir invraisemblable de lancer des agressions contre d’autres pays sans consulter ni le Parlement ni les électeurs !
Le gouvernement français joue dans cette affaire le rôle de supplétif du gouvernement des États-Unis, François Hollande cherchant sans nul doute à faire oublier le bilan catastrophique de son mandat, le déni de toutes les promesses qu’il avait faites et la régression sans précédent des droits sociaux qu’il met en place. Fort de son aventure néocoloniale au Mali, qui n’a jamais été motivée par le souci de la démocratie mais par la nécessité de protéger les nombreuses sociétés françaises qui exploitent le pays, il veut maintenant jouer à la grande puissance avec des moyens qu’il n’a pas.
Une intervention prétendument humanitaire des États-Unis et de la France ne pourra conduire qu’à une extension de la guerre civile en Syrie. Des forces politiques extrêmement complexes, des intérêts économiques violemment antagoniques s’affrontent dans une véritable guerre qui oppose les puissances occidentales, États-Unis en tête, d’une part, et de l’autre l’Iran, la Syrie et le Hezbollah libanais, avec la Russie et la Chine jouant les arbitres. D’ores et déjà, nous n’avons plus affaire à une guerre civile mais à une guerre internationale larvée qui ne demande que le bombardement de la Syrie pour devenir une guerre ouverte. Pour les États-Unis il s’agit d’éliminer toutes les forces qui s’opposent encore à leur mainmise sur la région. L’élimination de la Syrie, puis du Hezbollah libanais, est une étape vers une guerre contre l’Iran. Ce dont il s’agit aujourd’hui, c’est d’une guerre non déclarée entre les États-Unis et l’Iran alors même que le nouveau président Rohani a été élu sur la promesse de retisser des liens avec l’Ouest et de rechercher un accord sur la question syrienne, ce dont l’administration US ne veut tenir aucun compte.
En restant indifférents aux menaces de guerre auxquelles le gouvernement Hollande s’associe stupidement, nous nous ferions les complices d’une escalade sans précédent : il faut être d’une naïveté extrême pour imaginer qu’on peut renverser un régime comme celui de la Syrie sans envoyer des troupes au sol. Si cette éventualité devait survenir, les troupes occupantes auront alors à faire face à une grande multiplicité de factions armées opposées qui les pousseront à un embourbement inévitable. En Syrie, certaines de ces factions qui animent la révolte oppriment aujourd’hui la population aussi durement que ne le faisait le régime d’al-Assad : corruption, racket, enlèvements et exécutions sommaires.
Des groupes proches d’Al-Qaïda se voient renforcés par des djihadistes surentraînés venant d’Irak, d’Arabie saoudite, de Libye, de Tchétchénie, voire de Tunisie.
La guerre civile en Syrie n’est pas une manifestation du « Printemps arabe », qui a soulevé une sympathie générale, mais qui a été dévoyé par les mouvements intégristes musulmans. Jamais nous n’avons été si près d’une guerre régionale généralisée dont les victimes seront la population syrienne, y compris les nombreuses minorités religieuses et culturelles du pays, mais aussi l’ensemble des populations du Proche et du Moyen-Orient.
L’histoire a révélé que la guerre du Golfe de 1990-1991 aurait pu être évitée car des propositions de négociation avaient été faites par les différentes parties en présence, en particulier l’Égypte, mais que l’administration américaine a tout fait pour les écarter. De telles propositions de négociation et de compromis existent aujourd’hui sur la question syrienne, mais elles sont, elles aussi, écartées par les États-Unis et leur industrie de guerre.
Nous, anarchistes, nous opposons fermement à une intervention militaire. Malgré notre faculté minime à intervenir concrètement, nous exprimons notre solidarité la plus totale envers l’ensemble des populations opprimées de Syrie, des deux côtés, et exprimons le vœu qu’elles seront en mesure un jour de prendre en main leur destin après avoir, ensemble, renversé leurs oppresseurs.
Non au bombardement de la Syrie.
Non au néocolonialisme français.
La France ne doit pas devenir un supplétif des États-Unis.


Le 8 septembre 2013