Loi Macron : nous n’avons pas su…

mis en ligne le 25 février 2015
La loi Macron aura donc eu chaud au derrière, obligeant le Premier ministre, Manuel Valls, à recourir au fameux article 49-3 pour la faire passer (rappelons que ledit article permet d’envoyer une loi directement au Sénat, sans validation par l’Assemblée nationale). Les prétendus « frondeurs » du Parti socialiste seront donc enfin parvenus à foutre les pétoches au gouvernement, sans pour autant, bien sûr, aller jusqu’au bout de leur posture et risquer leur place dans l’hémicycle… Car si ces pseudo-rebelles en costarcravate avaient été conséquents, s’ils avaient vraiment voulu mettre un terme à la politique économique ultralibérale de Manuel Valls, alors auraient-ils voté la motion de censure du gouvernement, laquelle, adoptée, contraint le président à dissoudre l’Assemblée nationale. Mais les choses ne se sont finalement pas passées ainsi et les moutons noirs – qui restent des moutons – sont rentrés dans le rang, laissant le vote de la motion de censure à la droite – UMP et UDI –, qui ne parvint pas à réunir les 289 voix nécessaires (tout juste en obtint-elle 234).
Acculé, le ministre de l’Économie aura quand même été jusqu’à invoquer les chômeurs pour défendre son projet de loi et justifier l’utilisation, par Manuel Valls, de l’article 49-3. Ainsi, le 19 février dernier, sur le plateau de BFMTV le sémillant Emmanuel Macron a-t-il déclaré, sans sourciller : « Si j’étais chômeur, je ne serais pas déçu de ce qui s’est passé hier, au contraire. » Mais cette déclaration n’a pas été, bien sûr, sans une stigmatisation des sans-emploi, l’ancien banquier toujours millionnaire précisant : « Si j’étais chômeur, je n’attendrais pas tout de l’autre, j’essaierais de me battre d’abord ! » Une habitude, décidément, au gouvernement « socialiste », qui à travers des déclarations outrancières de François Rebsamen, le ministre du Travail, avait déjà tapé sur les chômeurs.
Certes, cette mascarade parlementaire nous concerne bien peu, les bisbilles entre députés ne nous ayant jamais vraiment intéressés. Mais l’épisode a tout de même le mérite de nous rappeler – on ne peut plus clairement – le rôle de défenseur des intérêts du capital de l’État, lequel n’hésite pas à foutre en l’air son précieux simulacre de démocratie – celui qu’il veut de par le monde exporter – quand il s’agit d’adopter des lois comme celle élaborée par Emmanuel Macron, qui sécurise la délinquance du patronat tout en affaiblissant considérablement les droits des travailleurs.
Toutefois, au final, il n’y a rien de bien étonnant dans cette histoire. Rien d’étonnant, en effet, à ce qu’un gouvernement qui se revendique désormais ouvertement du libéralisme (tout en lui ajoutant le qualificatif de « social ») propose une pareille loi et la fasse passer de force. Rien d’étonnant à ce que la démocratie parlementaire se renie aussi facilement pour valider un tel projet de « réforme ». Rien d’étonnant, non plus, à ce qu’un ministre s’en prenne aux chômeurs, cibles faciles qui n’en restent pas moins de sévères épines dans le pied des politiques économiques et sociales libérales.
Si tout cela est advenu, ce n’est jamais que du fait de notre propre passivité, à nous travailleurs et travailleuses, qui sommes les premiers victimes de cette loi. Une fois de plus, nous n’avons pas su faire barrage, par la lutte, aux ambitions d’un gouvernement aux bottes d’un patronat avide et toujours plus cynique. Alors que la loi Macron était chahutée de toute part, nous n’avons pas su construire un mouvement social solide, nous n’avons pas su déserter nos entreprises pour envahir les rues, laissant la loi Macron être la chose des députés, le jouet de politiciens puériles et hypocrites.
Nous n’avons pas su et, bientôt, nous en ferons les frais.

Théodore Vial
Groupe Salvador-Seguí de la FA