Informations brèves et décousues sur les migrations

mis en ligne le 14 septembre 2003

Sarkozy et les sans-papiers : beaucoup d'effets d'annonces, peu de mesures ! La directive du 19 décembre adressée aux préfets par le ministre de l'Intérieur est loin de répondre aux besoins et aux attentes des sans-papiers, dont de nombreuses initiatives en 2002 ont insisté sur la nécessité d'une régularisation collective.

Parmi les avancées : au niveau de la réception des demandes, le ministre préconise que « tout doit être mis en œuvre pour faciliter l'accès aux guichets et réduire les inconvénients des files d'attente ». Il ajoute l'utilité de « créer des accueils distincts pour les primo-demandeurs, les demandeurs de renouvellement de titre de séjour, les étudiants, les demandeurs d'asile ». Tant qu'à faire, il demande la création « d'un accueil spécifique pour les prises de rendez-vous et remise de formulaires à renseigner afin que le premier entretien soit constructif et ne nécessite pas une deuxième rencontre ». C'est du bon sens administratif.

Cependant, tout cela est présenté sous forme de préconisations, et le ministre souligne que cela doit être mis en œuvre « sans méconnaître les contraintes immobilières qui sont un handicap lourd dans bien des cas ». Au fait, il est d'autres secteurs des ministères de l'Intérieur et de la Justice où les contraintes immobilières sont levées : les centres de rétention et les prisons. Quand on veut, on peut (refrain de droite bien connu) et « retenir » reste prioritaire sur « accueillir ».

Concernant le réexamen des dossiers, le ministre indique bien que « la position consistant à opposer une fin de non-recevoir, sans examen du dossier et, le cas échéant, sans tenir compte d'éléments nouveaux, est à proscrire… Dans tous les cas, dès lors que vous avez accepté le principe du réexamen du dossier, il conviendra de ne pas mettre en œuvre les éventuelles mesures d'éloignement pendantes jusqu'à la prise d'une décision confirmant le bien-fondé de celles-ci ».

Très bien, mais le ministre s'empresse de signaler que les dossiers présentés collectivement par des collectifs et associations « ne bénéficient d'aucune priorité au regard des demandes déposées individuellement et qu'il revient aux intéressés d'effectuer personnellement les démarches utiles ». D'où il découle naturellement que les mesures de reconduite peuvent quand même s'appliquer dans le cas où « l'insuffisance des informations qui vous sont communiquées (par exemple de simples noms sur une liste) empêche de procéder efficacement au réexamen ».

Pour le reste, cette directive donne des précisions sur le maquis de preuves à apporter par les éventuels bénéficiaires de certains articles de la loi Chevènement, « vie privée et familiale », « résidence habituelle en France depuis dix ans ou plus », « étrangers malades ». Le texte élargit la notion de couple et n'exclut pas les liens collatéraux dans des cas exceptionnels. Il sera tenu compte aussi de la situation d'étrangers accompagnant des personnes malades ou de femmes victimes de violences, mariages forcés, répudiations. Ce sont là quelques points qui peuvent améliorer la défense juridique d'un certain nombre de personnes.

Mais au final, le ministre « laisse aux préfets le soin d'apprécier les situations dignes d'intérêt ». Il appartient donc en ce début 2003 aux sans-papiers de faire savoir qu'ils sont tous et toutes dignes d'intérêt.

Remise en cause de l'aide médicale gratuite pour les sans-papiers

Les députés, lors du vote du budget 2003, ont décidé de ne plus faire bénéficier les sans-papiers de l'Aide médicale d'État (AME), qui leur permettait d'accéder gratuitement aux soins. Pour Jean-François. Mattei, le ministre de la Santé, il s'agit de « sortir du tout-gratuit ». Pour son collègue du Budget, Alain Lambert, « une certaine responsabilisation est nécessaire ».

Ainsi, au nom de la « responsabilisation », l'État soustrait une population déjà précarisée d'un minimum de soins médicaux, prévention, dépistages et lui fait courir le risque de pathologies plus ou moins graves, dont l'hôpital héritera quand elles auront dépassé une certaine gravité. Qui est l'irresponsable dans cette histoire ?

De nombreuses associations et syndicats s'indignent de cette situation. Par exemple, le Syndicat de la médecine générale dénonce « ces mesures discriminatoires pour l'accès aux soins, inacceptables sur le plan médical et aberrantes en termes de santé publique ».

Une décision cynique qu'on ne peut s'empêcher de rapprocher de l'échec des négociations de l'OMC (Organisation mondiale du commerce) concernant la possibilité des pays pauvres de fabriquer des médicaments génériques.

Cet échec, lourd de conséquences sur la santé publique, est imputable à l'intransigeance des États-Unis, soucieux de protéger les brevets de ses multinationales pharmaceutiques, et donc leurs profits. Santé publique ou profits privés : on ne peut laisser une petite minorité de capitalistes et de technocrates hypothéquer le bien-être d'une majorité d'individus sur terre.

Raël et les clones

Cette secte, qui prétend que la vie humaine est d'origine extra-terrestre (ce qui n'est pas le plus grave dans ses affirmations), semble avoir trouvé le filon pour faire de l'argent : développer l'élevage de clones humains. Fin décembre, cette secte a annoncé la naissance d'une petite fille, conçue par clonage.

La secte, derrière un discours de paix, de sensualité et d'amour, est porteuse d'une philosophie on ne peut plus élitiste, notamment autour du concept de « géniocratie », littéralement pouvoir des génies, l'intelligence au pouvoir : le bouquin de Raël (Les extra-terrestres m'ont emmené sur leur planète) est un ramassis de bêtises, dont on pourrait rire si ce n'était pas grave. Extraits choisis de ce bouquin édité en 1983 :

« Seule la géniocratie est valable qui est une démocratie sélective. Comme cela est dit dans Le livre qui dit la Vérité, seuls les gens dont le niveau d'intelligence est supérieur à 50 % à la moyenne doivent être éligibles et seuls ceux dont le niveau d'intelligence est supérieur de 10 % à la moyenne peuvent être électeurs » (page 115).

« Soit raciste avec les imbéciles quelle que soit la couleur de leur peau » (page 130).

« Ce n'est pas un hasard que l'Occident ne connaît pas les problèmes du tiers-monde » (page 135).

« Les hommes qui désirent avoir une ou plusieurs compagnes en dehors des rapports d'égalité qui existent entre hommes et femmes éternels ou qui ne veulent pas vivre avec une femme sur un plan d'égalité, peuvent avoir une ou plusieurs femmes "robots biologiques" absolument soumises et auxquelles la machine donne exactement le physique que l'on désire… Ces robots biologiques sont en fait fabriqués sur le même principe que nous [les Hélohims, sorte de demi-dieux que prétend avoir rencontré Raël, ndr] avons pour créer les hommes de la terre, d'une manière 100 % scientifique » (p. 69 et 70).

Ce passage éclaire la volonté de Raël et de ses « fidèles » d'expérimenter au plus vite les techniques du clonage : créer une sous-humanité qui servirait à la fois d'esclaves sexuels et de réserve d'organes pour les « élus », leur garantissant une quasi-immortalité.

Pétain n'est pas mort

L'épisode ci-dessous nous rappelle que l'horreur et la méchanceté n'ont pas besoin de sensationnel pour exister. Selon Libération du 26 décembre 2002, une société de recouvrement employée par les hypermarchés Carrefour menaçait certains de ses clients, en mal de paiement, d'une dénonciation au ministère de l'Intérieur au cas où ils ne disposeraient pas de papiers d'identité en règle. De quoi je me mêle ?

Crise du logement

Selon le rapport 2002 de la Fondation Abbé Pierre, on compte en France 3,1 millions de mal-logés, dont deux millions vivant dans l'inconfort (ni WC ni douche), 1,7 million en logement surpeuplé, 86'000 SDF, dont 16'000 enfants, 708'000 ménages vivant de manière précaire dans des meublés, des hôtels, des campings.

L'hébergement d'urgence est en crise, les appels au 115 sont saturés. Selon la Fondation Abbé Pierre, il manque environ un million de logements sociaux. Or, seuls 40'000 nouveaux logements HLM ont été budgétés en 2002, alors que le gouvernement Raffarin en promettait le double. Raffarin et Cie se moquent de la France d'en bas. Que 2003 soit une année de contestation, de grogne, de revendications !