Ils dégraissent nos retraites

mis en ligne le 6 mai 2010
Ça va pas être facile. Le soir du 23 mars, on était plutôt contents et surpris que la journée d’action pour les retraites ait été un relatif succès. Le problème étant le 24 où on retournait au turbin comme si de rien n’était. L’an dernier, ayant connu des « journées d’action » à répétition et inefficaces, on n’a pas eu envie de remettre ça, et, du coup : rien. Le 20 avril dernier, les nouvelles manifs étaient, au mieux, départementales, mais surtout ridicules. Quand on ne veut pas qu’un mouvement se forme, prenne de l’ampleur, on ne s’y prend pas autrement. Pour les organisations syndicales, il semble qu’il ne soit plus question de mobilisation. Engluées qu’elles sont dans les réunionnites, tables rondes et rencontres ministérielles, il n’est plus question que de journées d’action pour canaliser les mécontentements et basta. « On s’occupe de tout. » Il ne s’agit plus que d’un syndicalisme d’accompagnement – pas de lutte – qui ne sait plus que négocier la quantité de vaseline nécessaire pour nous faire passer telle ou telle « réforme ».
Et ça devient plus que grave parce que, dans le camp d’en face, ça s’active, à coups de publicité, d’informations bidon, de journalistes aux ordres… Le Medef et le gouvernement en font une question de principe. Ils veulent une victoire sur les retraites et contre les salariés, pour appliquer d’autres contre-réformes. Ils veulent « détricoter » les acquis de la Libération, casser tous les droits sociaux pour n’avoir, dans quelques années, que des salariés qui accepteraient les conditions les pires pour travailler à tout prix, comme dans les pays émergents.
Nous subissons quotidiennement un bombardement intensif et permanent visant à nous faire accepter le recul de l’âge de départ à la retraite et la baisse des pensions. Il s’agit d’une gigantesque manipulation de l’opinion.
Sous couvert de l’expertise du Conseil d’orientation des retraites (COR), État et patrons veulent organiser la panique. Les prévisions vont jusqu’à 2040 ou 2050. Comment croire des prévisions qui vont si loin, lorsque les « experts » se trompent sur six mois et n’ont même pas vu venir la crise ? Personne n’est capable de prévoir quoi que ce soit. Le rapport nous parle de taux de fécondité, d’augmentation de la durée de vie, du nombre de retraités… Rien de scientifique. Le rapport se fie à aujourd’hui, où ceux et celles qui arrivent à l’âge de la retraite sont issus de la génération du baby-boom, mais ceux et celles qui atteindront la retraite bientôt seront issus des « classes creuses », et il y en aura moins. Quant à l’allongement de la durée de vie, avec l’amiante, les pesticides, l’augmentation de la durée du travail et j’en passe, c’est même pas gagné.
Les mesures préconisées pour obtenir un équilibre des comptes des caisses de retraite en 2050 seraient : report de l’âge de départ à la retraite (jusqu’à 70 ans !) ; baisser les pensions de 48 %, ou/et majorer les cotisations sociales.
Pour tenter d’imposer une telle remise en cause des acquis, la propagande dit qu’il faut travailler plus longtemps et que les prétendus déficits des caisses nécessitent que les salariés se serrent la ceinture. L’allongement de la durée de cotisations, de 37,5 à 40 annuités, n’a permis que 4 % des économies obtenues. Il s’agit juste d’idéologie, pour nous écraser davantage. Pourtant il y en a qui sont loin de se serrer la ceinture : l’ancien PDG de L’Oréal touche l’équivalent de 400 fois le minimum vieillesse (hors stock-options et autres).
Alors sur la question des retraites il ne peut y avoir d’arrangement, il n’y a rien à négocier. Il s’agit juste d’un partage des richesses produites, mais, pour imposer ça, il faut se battre. Reste à trouver le chemin de l’offensive, et vite.