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par Pierre Sommermeyer. le 9 janvier 2023

La puissance d’une arme

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Article extrait du Monde libertaire n°1845 de décembre 2022



illustration de Slo parue dans le Ml de novembre 2018
Une des façons de mesurer la puissance d’une arme est de considérer la qualité des protections élaborées par le destinataire de cette arme pour s’en protéger. L’arme en question peut être un moyen non létal comme l’utilisation de mots ou garder le silence. Dans ce dernier cas, certains se limitent à interroger le menteur, d’aucuns ont inventé le détecteur alors que d’autres ont utilisé la torture, le non-dit leur semblant si important que la méthode leur importait peu. Quand il s’agit d’armes dites militaires, visant à tuer, l’ennemi potentiel ou l’ami du moment va chercher comment s’en protéger et pourquoi ne pas frapper le premier.

Désobéissance civile
Dans les conflits que l’on nomme sociaux, il en est de même. Les mesures les plus fortes dans les États dits démocratiques relèvent au maximum de la réquisition, comme dans ce conflit des raffineries et peuvent aller jusqu’à la déclaration de l’état d’urgence quand le pouvoir pense que la patrie est en danger.
Il arrive, dans notre pays hautement policé, que la menace islamiste soit apparue si grande qu’il a fallu élaborer une loi pour lui faire face. Celle-ci, dite « loi séparatisme » (24 août 2021), introduit un contrat d’engagement républicain « confortant le respect des principes de la République ». Depuis le 1er janvier 2022, toutes les associations qui souhaitent bénéficier d’un soutien financier ou matériel d’une collectivité publique, ou disposer d’un agrément leur permettant d’agir selon leur objet doivent donc signer ce contrat qui les oblige et restreint leur liberté d’action. Quoique le Conseil d’État ait retoqué certaines des dispositions contenues dans la loi, le préfet de la Vienne a intimé à la Mairie et à la Métropole de Poitiers de retirer à Alternatiba toutes subventions puisque cette association avait l’intention de dispenser une formation sur la désobéissance civile non-violente.
Cette même association avait organisé, il y a deux ans, le décrochage de portraits de Macron dans un certain nombre de mairies. Des procès, trente-cinq, avaient suivi. Rappelons-nous qu’un portrait officiel du Président de la République coûte à la boutique de l’Élysée 9,90 € TTC. Les décrocheurs étaient poursuivis pour « vol », le fait qu’ils aient à chaque fois agi à plusieurs, constituant la « circonstance aggravante de réunion ». En vertu de l’article 311-4 du Code pénal, ils encouraient donc des peines de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.




Préparons la guerre !
Il est possible de trouver, dans le numéro de l’été 2020 d’Échanges et Mouvement, un article bien informé sur le commerce des armes. En ce qui concerne celui-ci, il est rappelé qu’il reste un marché comme un autre, soumis aux lois du fonctionnement capitaliste. Pour beaucoup, si ce n’est tous les articles de ce commerce, les entreprises concernées ne peuvent miser que sur quatre facteurs : l’expansion géographique, l’obsolescence, la consommation et la propagande. En ce qui concerne ce qui se passe en Ukraine, on a vu différentes puissances, sous prétexte de solidarité, se débarrasser des vieilles versions de leur armements. Car, rappelle E. et M., pour qu’il y ait consommation dans le commerce des armes, la guerre est nécessaire.
Dans ce contexte, l’Ukraine, couverte par un grand nombre de médias, joue le rôle d’un Salon d’armement, un Satory à ciel ouvert. Les autres champs d’utilisation de ces matériels, comme la Libye, la zone malienne, la R.D.C., le Liban ou le Yémen, étant le plus souvent difficiles d’accès et beaucoup moins porteurs. On va probablement assister ainsi, aux frontières de l’Europe, à l’utilisation de ces nouveaux « outils » que sont les « armes à énergie dirigée ». C’est ce que sous-entendent les Russes quand ils agitent la menace de bombes sales. Il suffit de faire une petite recherche sur Google pour avoir toutes les infos désirées sur ces engins de mort. On y apprend que celles-ci émettent de l’énergie dans une direction voulue sans besoin de projectile. Elles transfèrent l’énergie vers une cible pour l’effet souhaité. Les effets recherchés sur les humains peuvent être létaux ou non.
Le complexe militaro-industriel doit rester à la tête du « progrès » technologique et doit toujours prouver son efficacité. E. et M. en vient à penser que toute lutte, d’une certaine ampleur, contre ce complexe, de la part d’opposants à la guerre pourrait aboutir à renforcer l’activité des attaqués. « Plus le mouvement serait puissant, plus importante serait la contribution au fonctionnement de ce complexe ». Alors que faire ? « La seule chose qui ne peut être atteinte par une répression relève du comportement individuel de chaque être humain, que l’on peut résumer par deux mots : retrait et sabotage. Le retrait peut être non seulement politique ou institutionnel mais aussi dans la pratique quotidienne de vie, et cela semble la seule chance d’échapper à l’emprise du complexe militaro-industriel ». Car, selon le rédacteur de cet article, la récupération, le pillage ou sabotage sont récupérables sous une forme ou une autre par le complexe militaro-industriel. Et de terminer son article par cette admonestation « Et c’est précisément à chacun de voir ce qu’il peut faire à ce point et de chercher d’autres compères avec qui s’associer ».

Le retrait ou l’action ?
Il est assez surprenant de lire dans un tel bulletin, consacré à l’information sur les conflits de classe, un encouragement au retrait, seul ou à plusieurs. Que peut d’ailleurs signifier un tel conseil ?
Dans le même bulletin, le lecteur va trouver ceci : « Au début de la production d’armements, les rebelles pouvaient s’approprier les armes à feu. Aujourd’hui, les armes ont atteint un tel degré de sophistication que seuls des États peuvent se les approprier. Donc, la question se pose : que faire ? Comment combattre ? Tout combat collectif ARMÉ est condamné, donc seul le retrait est possible dans ce cadre. Toute manifestation ou grève pouvant être réprimée par ces armes sophistiquées ».
Si la violence armée, c’est-à-dire l’insurrection révolutionnaire dans sa version historique n’est plus possible, il reste néanmoins deux types de violence. Celle éruptive qui prend la forme de destruction de distributeurs de monnaie, de vitrines brisées ou d’affrontements directs à la force policière. Tout cela a lieu lors de manifestations publiques dûment autorisées par les pouvoirs en place. Il reste la violence non-armée, non éruptive, réfléchie, qui peut prendre plusieurs formes toutes basées sur la désobéissance, la non-coopération, et l’intervention directe. Toutes formes qui existent depuis fort longtemps qui étaient connues sous les termes d’action directes non-violentes, ce dernier qualificatif ayant pour effet d’irriter bien des militants attachés à l’idée d’insurrection armée devenue aujourd’hui impossible. Ce sont bien ces formes d’intervention que le pouvoir français reconnaît comme étant dangereuses.

Une pétition malvenue ?
Au début du mois de septembre, une pétition rassemble un bon nombre de signatures pour protester contre la volonté étatique de considérer la désobéissance civile non-violente « incompatible avec le contrat d’engagement républicain » introduit par la loi du 24 août 2021 « confortant le respect des principes de la République », dite « loi séparatisme ».
Les signataires d’affirmer que « La désobéissance civile, pourtant, est bien loin de constituer un mépris de la République » et que contrairement aux dires du préfet de la Vienne, membre de la direction d’En Marche, une telle préparation à des actions de ce type ne reviendrait pas à « sortir du champ républicain ».
Se pose maintenant la question de savoir si cette République, dont certains nous rebattent les oreilles, n’est pas, telle qu’elle fonctionne, la garante de l’aliénation que nous supportons. Il apparaît bien que les actes de désobéissance civile, que ce soit sous forme de grèves, de sabotages, de non-coopération, de manifestations, sont les seules façons d’arriver à sortir de cette République oppressive.

Pierre Sommermeyer. Individuel

légendes
1 illustration de Slo parue dans le Ml de novembre 2018
2 source inconnue
PAR : Pierre Sommermeyer.
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