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par Wally Rosell le 22 juin 2020

Les végans ont-ils conscience de participer à la destruction de la biodiversité ?

Lien permanent : https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=4922

article extrait du Monde libertaire n°1812 de décembre 2019
Je n’ai rien contre les végétariens, ni contre les végétaliens, leur choix est respectable et à respecter. Je soutiens aussi toutes les actions qui contribuent au bien-être des animaux et des êtres humains. Je considère que les fermes aux mille vaches, cochons, etc. sont aussi dangereuses qu’inutiles. C’est un fait, l’élevage taylorisé, industrialisé est responsable de la dégradation générale de notre planète.

Je vous propose d’énoncer quelques contradictions qui - à mon sens - aboutissent à l’inverse de ce que recherchent ces défenseurs de la nature.





Je pense que mettre sur le même plan, l’impact d’un élevage « paysan » dans le bocage ou dans les Pyrénées et les dévastations liées à l’industrialisation de la filière « viande » en Amérique du sud procède de la mauvaise foi. Pour moi, c’est assimiler l’impact d’une Amap libertaire à celle de « Monsanto » ou mettre la librairie libertaire Publico et Amazon dans le même sac au prétexte qu’elles vendent toutes les deux des livres.




En tant qu’anarchistes, nous sommes pour une agriculture paysanne collectivisée et respectueuse des Hommes, de la nature. Une agriculture qui contribue au bon état de la biodiversité de notre planète.
L’élevage fait partie intégrante de cette agriculture.

Le bocage. C’est un espace entièrement façonné par l’Homme et qui pourtant est un des habitats riches en espèces sauvages en Europe. Le bocage est un régulateur climatique et hydraulique. La haie bocagère abrite plus d’espèces d’arbres et d’arbustes qu’une forêt « normale » française [note] . Des feuillus qui participent à la respiration de la planète et à la production locale de bois. Ces haies et fossés constituent un maillage de corridors verts et bleus qui permettent à la faune de se reproduire ou de traverser la France et une partie l’Europe de l’ouest.

Les prés, prairies et autres espaces ouverts font partie des habitats terrestres où la biodiversité est la plus riche sur notre planète. Dans 1m2 de pré on peut compter jusqu’à deux fois plus d’espèces végétales différentes qu’en forêt (hormis les 4 ou 5 grandes forêts primaires de notre planète), or, le bocage a d’abord été conçu pour l’élevage. Sans l’entretien des troupeaux, le bocage disparaît et sa biodiversité avec [note] .

Si les prairies abritent autant de flore et de faune sauvage, c’est grâce à l’activité des troupeaux. Comment ?

Un troupeau participe à la bonne conservation des espaces et à la bonne santé des espèces animales sauvages parce qu’il est respectueux des êtres vivants et de leurs relations réciproques et ce, principalement par trois actions différentes :
- Leurs déjections participent directement à la fertilisation des sols et indirectement permettent aux insectes et autres espèces invertébrées de se développer. Ils constituent les premiers éléments de la chaîne alimentaire des espèces sauvages « supérieures » : batraciens, petits mammifères, oiseaux, etc.
- Le piétinement des troupeaux participe à l’aération et à la fertilisation naturelle des sols, ils permettent à des micro-organismes vivants de remonter à la surface du sol (et inversement). C’est un des principes de la permaculture. Le piétinement est aussi à l’origine de la formation de mini flaques d’eau où se développent des batraciens et participent à la trame « bleue » dans les espaces ruraux (et péri-urbains).
- Par leur alimentation. En mangeant tout ce qui est feuilles, herbacées et autres végétaux, ils régénèrent ces habitats et permettent la diversification des espèces végétales. Ils nettoient la nature et empêchent par exemple la fermeture des habitats tels que le maquis et la forêt méditerranéenne. Nous savons que la principale action préventive contre les feux « méditerranéens » est le débroussaillage des sous-bois, des éboulis et autres espaces étroits. Or, ce sont les troupeaux de chèvres et de moutons qui sont les plus efficaces pour faire ce travail.

On pourrait aussi parler du rôle essentiel des troupeaux en montagne. Ce sont eux qui maintiennent les prairies d’altitude qui empêchent l’érosion et les conifères de tout envahir. La réintroduction des grands rapaces dans les Causses et dans les Pyrénées n’aurait pas été possible sans les troupeaux de moutons et de chèvres. Les vautours et autres gypaètes sont spécialisés dans l’élimination des cadavres. Or ce sont les cadavres des moutons du Larzac ou du Pays basque qui fournissent l’essentiel de cette nourriture.

Pas de miel, pas de légumes !
Les végans ne mangent pas de miel. C’est l’exemple type de la schizophrénie de cette mode. Il est vrai qu’en matière de taylorisation de la production, le miel est ce qui se fait de pire dans la nature. Néanmoins, l’abeille (avec quelques autres insectes) est un maillon essentiel de la biodiversité de notre planète et surtout de l’agriculture. Domestiques et sauvages les abeilles sont indispensables à la pollinisation et à la fécondation de la grande majorité des plantes, des arbres et des cultures. Sans les abeilles, plus de graines de tournesol, de colza, etc. La plupart des légumes et la quasi-totalité des fruits disparaîtraient des assiettes véganes. L’élevage des abeilles est donc essentiel à notre alimentation et à la bonne santé de notre planète.

Vive les poules et les canards !
Les déchets, générés par notre société, sont une plaie pour la planète. Pour les détritus organiques, il existe des solutions de proximité : le compost (individuel ou collectif) et le poulailler. Les poules recyclent tous les déchets organiques. Certaines communes subventionnent l’implantation de poulaillers collectifs ou individuels, réduisant ainsi drastiquement le volume des ordures partant dans des incinérateurs qui participent largement à la pollution de l’air. Les poules luttent ainsi contre le réchauffement climatique.

De même, on connaît, maintenant, le rôle important que jouent les troupeaux de canards dans l’entretien des rizières en Asie et en Camargue. Les canards débarrassent les rizières des résidus végétaux et des « mauvaises herbes ». Ils améliorent la qualité de l’eau et permettent ainsi aux agriculteurs de supprimer l’emploi des pesticides [note] . Merci aux troupeaux de canards !

Je ne dis pas qu’il faut continuer à surconsommer de la viande, je prétends qu’il faut débarrasser l’élevage du capitalisme et que ce n’est pas la consommation raisonnée de viande qui est à combattre mais le capitalisme dans sa totalité. C’est lui qui pourrit la terre et détruit nos vies.

Quant au problème climatique, il existe de nombreuses solutions pour réduire drastiquement les effets de la pollution. Qui sait que les 8% les plus riches polluent 8 fois plus l’air que les 10% les plus pauvres. On ne peut séparer les enjeux écologiques des problèmes liés aux inégalités sociales. C’est ce qui nous proposions - au début des années 2000 - avec la campagne pour « les transports gratuits pour toutes et tous » !

Wally Rosell


PAR : Wally Rosell
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1

le 22 juin 2020 10:48:39 par R.B.

Bravo Wally !

2

le 23 juin 2020 22:06:01 par Luisa

Excellent ! Merci beaucoup !

3

le 24 juin 2020 15:06:13 par Patrick Le Monnier

Merci pour cette remise de pendule à l’heure! Il est important de dénoncer les incohérences de ces végans qui ressemblent aux fondamentalistes religieux de par leur extrémisme.

4

le 25 juin 2020 13:40:32 par Lucas

Je pense que l’un des site de référence du "mouvement" ( même si nous ne parlons pas d’un groupe défini là, un peu comme mettre tout les fans de rock dans le même panier: nombreux ne vont pas être content ahah ) explique bien le soucis au niveau mondial: [LIEN] Monde Vegan/Planete.html

Pour le miel et les viandes, prendre aux petits producteurs ( j’ai envie de dire pour les légumes aussi.. ) et le problème d’empreinte carbone disparaît.

Pour les bocages, je pense que c’est symboliquement assez cruel vu que nous avons appauvri considérablement l’ensemble des sols français et une grande partie des sols mondiaux à cause de l’élevage et de l’agriculture.
Le calcul est assez simple et rapide alors je vous le refait: Un légume a besoin d’eau et de terrain ( de terrain, moins bons rendements, et sols abîmés si l’agriculture est productiviste, mais c’est la mode ), l’animal lui a besoin d’eau et de terrain mais aussi du légume.

Bien sûr le véganisme se "capitalise" et joue de la mondialisation: il était temps dans un monde où toutes les industries sont tristement dans cette même mouvance.

5

le 25 juin 2020 19:56:03 par Invité

Il y a un aspect que tu n’as pas du tout évoqué sans doute par démagogie ou juste par méconnaissance. L’alternative des refuges et des Sanctuaires pour animaux : le but de ces endroits est de sortir des animaux de l’élevage pour qu’ils puissent vivre une vie paisible sans exploitation. Aussi des personnes continent le système de bocage avec les animaux, ont des ruches sans les exploiter etc.. C’est ce que tu défends ici, mais sans le volet de l’exploitation.

6

le 25 juin 2020 20:07:30 par Bernard (CRML)

"Invité", évite les procès d’intention insultants. Tes remarques n’en auraient eu que plus audience.

7

le 25 juin 2020 21:08:04 par invite

Bernard ( CRML )
c’est pas comme si ce que la personne a écrit n’était pas un procès d’intention insultant

8

le 25 juin 2020 23:08:47 par bernard (crml)

"invité" tu compares un texte argumenté ( avec lequel tu as le droit de ne pas être d’accord ) à ton commentaire où tu accuses l’auteur de démagogie...

9

le 26 juin 2020 03:40:20 par Bruno Galloo

Et si tu comparer cher Wally la population vegane en France avec les surfaces cultivées en lentilles ...tu te rendrais compte que tu places le debat dans un mauvais endroit où même les abeilles ne vont pas ...vient en Picardie sur le terrain de la ferme des 1000 vaches justement ...cette "étable " n’est que l’arbre qui cache la forêt qui s’etend a perte de vue autour de la gare TGV dites "gare aux betteraves " ! J’y est été paysan bio ,eleveur de moutons , loin du Larzac et des Gypaètes mais les vautours qui veulent me piquer ma terre rodent et volent aussi bas qu’ils fauchent dans les grandes largeur comme la photo qui illustre cet article sur FB ! Pas l’ombre d’un vegan , ni d’une amap ou si peu ...derniers departements bio de France ...j’ai même plus les thunes pour payer ma certification bio et l’envie encore moins . La conf dont je fus porte parole regional m’ignore et Terre de Liens m’enterre alors tu penses bien que le quinoa des andins ...il me fait gentiment sourire et me rouler dans ma jachere faune sauvage biodiversifié ou abeilles ,gibiers ,coccinelles et papillons foisonnent ! Avec des espoirs :Solidarités paysannes et... véganes !

10

le 26 juin 2020 03:44:03 par Bruno Galloo

Au cas où , "slam rural paysan depaysant de Bruno" ...sur Youtube , autobiographie d’un fils de cut de 50 balais ,pas Anar mais vénère !

11

le 27 juin 2020 16:43:56 par Pm

Voilà une façon bien étrange d’affirmer respecter les choix des personnes vegeta*iens/vegans et finir par dire qu’il s’agit d’une mode.

Avez-vous simplement déjà discuté avec une personne vegan? A la lecture de cet article c’est à en douter.

Je n’ai jamais entendu de vegans vouloir lutter contre les petits producteurs de viande et pas contre le système capitaliste ????

Concernant le miel, à l’heure actuelle il semblerait que leur déclin soit avant tout dû aux divers pesticides et intrants chimiques plutôt qu’au 1,5% de vegans en France qui tentent de minimiser l’exploitation des autres espèces animales par les êtres humains.

12

le 28 juin 2020 10:45:50 par Aslatiel

Je doute que Wally ne se soient réellement intéressé au veganisme avant d’écrire son article: c’est une avalanche de lieux communs debunkés 15x par les militant.e.s végan.e.s, ça ne demande que quelques heures de recherche ( ce qui est un minimum quand on écrit un article destiné à la publication ). Ou Wally n’a pas fait ce travail, ou il ne maîtrise absolument pas le sujet.

J’invite Wally, ainsi que celles et ceux qui auraient pu être convaincu.e.s par ce texte, de prêter une oreille attentive aux argumentaires vegans, au pluriel, de mettre de côté les lieux communs sans cesse rabâché envers les personnes vegans, que ce soit sur les idées en tant que tel ( dans ce texte je prendrais l’opposition classique "petit paysan qui fait de la viande vs les vegans qui ne jurent que par l’industrie", un classique ) ou notre prétendue ’agressivité’, "fanatisme" ou que sais je. Wally tient ici un discours qui se veut scientifique: sur le meme ton, souvent les mêmes interrogations, je vous invite à regarder les vidéos de Jihem Doe sur YouTube, qui malgré un ton désagréable saura répondre à pleins de points développés dans ce texte, entres autres.

Vive l’anarchie, pour tous les animaux <3

13

le 13 juillet 2020 00:52:06 par Jean Bonneau

Le véganisme s’attaque uniquement à la partie éthique et morale du problème. Et non à la partie écologique et/ou sociale.

Moi même végé depuis des années mon point de vue est que le problème vient de la localisation de la ressource ( pour paraphraser ).
Les lentilles ne sont pas mangés uniquement par des vegans. On peut très bien manger du quinoa avec un steak de boeuf. Le problème étant toujours le même. Non le régime mais l’aliment.

Ayant aussi vu venir cette arnarque de veganisme capitaliste,qui cherche principalement à vendre et non à résoudre le problème, je ne me défini plus comme vegan. Aux gens qui me demandent, je dis simplement que je ne mange plus d’animaux considérant que leur émancipation et leur liberté sont relativement sabotées par les humains pour des raisons essentiellement ( pas exclusivement ) gustative et que je peux m’en passer assez facilement compte tenu du contexte social et économique dans lequel je vis.

Comme dis plus bas par Lucas, il suffit de se fournir en local et là, qu’on soit vegan ou pas le problème écologie est grandement réduit.

Il faut savoir sur quel plan on veut agir.
Le veganisme capitaliste, celui qui fait la promo des saussices de seitan et des nuggets de tofu, n’agît que sur le financement de la filière viande au sens large.
Si on veut agir sur le plan écologique et en même temps social il faut se tourner vers des producteurs et productrices locaux et locales.

Aussi même si la part de production de quinoa est relativement faible en france il existe des filières françaises qui peuvent suffir ( à moins d’en manger tous les jours ) mais je ne sais pas combien de litres d’eau ils utilisent, il faudrait les rencontrer, calculer, etc.

Dernier point concernant les abeilles, la plupart des abeilles polinisatrices ne sont pas les abeilles "à miel" dites domestiques. Elle polinisent mais bien moins que toutes les sauvages. C’est un faux problème, il suffit de voir la réaction de pas mal d’apiculteur face au syndrome d’effondrement des colonies. Beaucoup ont pour premier mot la perte économique avant de parler de la perte de biodiversité ( pareil pour les eleveurs ).
Aujourd’hui l’abeille a miel est toujours vu comme une ressources, c’est un business et non un projet de sauvegarde de l’espèce. Je serai le premier à acheter du miel si tel était le cas.
Je ne dis pas qu’elles ne sont pas en danger je dis qu’il y a une instrumentalisation qui peut nuire à la sauvegarde des espèces sauvages qu’on a vite fait d’oublier et dont le miel n’entre pas en jeu. Il existe près de 2000 espèces d’abeilles sauvages en Europe qui sont entrées dans la liste rouge de l’IUCN.

Voilà pour résumer, le veganisme est important pour les animaux et même s’il réduit drastiquement nos emissions de GES malgré tout si on est "locavore" ( les données doivent se trouver sur le net ) cela ne suffit clairement pas à solutionner le problème global.

14

le 25 juillet 2020 18:53:44 par Shevek

Cet article a eu deux réponses parues dans le Monde libertaire.
La première émane d’un "lecteur vegan" publiée dans le numéro de février 2020 ( n° 1814 ), pages 18 et 19, consultable ici : [LIEN]

15

le 25 juillet 2020 23:00:34 par Shevek

La 2nde réponse à cet article est parue dans le Monde libertaire de mai 2020, intitulée "Étrange biodiversité... Étrange bien-être" : [LIEN]
Comme quoi, le journal édité par la FA n’est pas monolithique.