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par Maurice, groupe La Sociale le 19 mars 2018

Tchao pantins ?

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Article extrait du « Monde libertaire » n° 1791 de janvier 2018
Il est clair que le mouvement social vit des moments difficiles. Confronté à une offensive sans précédent du pouvoir économique et de ses subsidiaires politiques, tétanisé par l’ampleur des coups, englué par les bureaucraties syndicales, miné par la prétention de la France insoumise et de son tribun à incarner et diriger la résistance, il ressemble à un insecte sur le dos s’agitant dans le vide. Macron et sa clique ont été mis en place par la finance pour accélérer et rendre irréversibles, si possible, les politiques d’austérité et de destruction des droits collectifs menées par les gouvernements précédents.





Ceux qui tirent les ficelles estiment que le rapport de force leur est favorable pour reprendre quasiment tout ce qui a été arraché par les luttes sociales parfois sanglantes depuis un siècle. Ils vont même plus loin en s’attaquant directement à ce qui reste de l’esprit lutte de classe dans le syndicalisme. Toutes les structures interprofessionnelles (notamment les unions départementales, les unions locales et parfois les fédérations) sont clairement menacées à court terme d’asphyxie financière et humaine. Dans un certain nombre d’endroits on cherche même carrément à les expulser de leurs locaux. Le pouvoir n’est plus disposé à accepter ce type de structures héritées des Bourses du travail qui permettent à des salarié-e-s du nettoyage de côtoyer des enseignant-e-s, à des salarié-e-s du privé de discuter avec des agents de la fonction publique, bref à permettre que « ceux qui ne sont rien », se retrouvent et s’organisent.

Liquider tout ce qui rassemble, tout ce qui unit…


Il faut pour le pouvoir, dans le cadre d’un dialogue social qui se résume à la formule « cause toujours », conserver des structures nationales pour la « com », type conférences sociales qui font la « une » des journaux télévisés. Il faut des syndicats d’entreprises ayant le nez dans le guidon, sans moyens véritables de faire face aux patrons, que l’on contournera d’ailleurs s’ils résistent. Et, il faut surtout, liquider tout ce qui rassemble, tout ce qui unit sur le terrain, tout ce qui permet à la lutte de classe de prendre toute sa mesure. Qu’on ne s’y trompe pas : c’est un état corporatiste – dans lequel le syndicat n’est qu’un rouage – qui se met en place comme au bon temps du maréchal Pétain.

L’épisode des ordonnances Macron détruisant le code du travail est particulièrement significatif des difficultés actuelles. Voilà un président au passé déjà chargé (loi facilitant les licenciements, loi développant le travail le dimanche, etc., quand il était ministre), arrivé au pouvoir directement téléguidé par le milieu des affaires pour « y aller à la tronçonneuse ». Il ouvre une « concertation » durant l’été 2017 avec les confédérations syndicales pour achever le sale boulot entamé par Hollande, Valls et El Khomri. Et les confédérations s’y précipitent. Avec une CFDT dans son rôle traditionnel d’accompagnateur du pouvoir, une CGT plus offensive – du moins dans les déclarations, et une FO dont le secrétaire général se sent autorisé à bafouer tous les mandats de son organisation et à se vautrer dans la compromission et les mensonges les plus éhontés.





Puis, les grèves et les manifestions les 12 et 21 septembre où se retrouvent des militants de la CGT, de Solidaires, de la FSU et, très souvent aussi, de FO – ceci, malgré les consignes contraires de son secrétaire général. Les journées de « mobilisation », s’enchaînent sans réelle perspective de blocage général. Les routiers CGT et FO se lancent dans la bagarre, sans réel soutien de leurs confédérations. Et enfin, durant la journée du 10 octobre « pour les revendications des fonctionnaires », on isole des salarié-e-s du privé... Cela s’appelle : la machine à perdre. Cerise sur le gâteau : certains dans les rangs de la France insoumise jugent opportuns dans ce cadre de remettre en cause les principes de la Charte d’Amiens qui donnent aux syndicats de base toute légitimité et souveraineté à décider de leurs revendications et actions sans tutelle politicienne.

A FO, la « base » réagit


Que de temps et d’énergie perdus, que d’acharnement à faire diversion, à empêcher la fédération des luttes – qui ne va déjà pas de soi tant l’individualisation voulue par le système fait des ravages. Durant l’intersyndicale nationale du 24 octobre, la CGT, FO, Solidaires et les organisations de jeunesse se font mettre dehors des locaux de la CFDT et mettent au point, dans un troquet, la grève du 16 novembre. Utile, mais tardive. La seule bonne nouvelle, dans ce paysage morose, c’est la reprise en main par la « base » des appareils, notamment à FO. Les UD et fédérations déjà largement dans l’action pour le retrait des ordonnances ont recadré, lors du comité confédéral national des 28 et 29 septembre, leur secrétaire général malgré les pressions, les menaces et manœuvres de tous ordres. De ce point de vue, le congrès confédéral de fin avril à Lille, devrait remettre certaines pendules à l’heure... Cela ne sera pas sans conséquence pour le mouvement social et pourrait même constituer un point d’appui non négligeable dans la bagarre d’ampleur qui doit se mener, sous la menace des mesures liberticides de l’état d’urgence, désormais pérennisées. Les chantiers de la formation professionnelle, de l’assurance-chômage et des retraites sont lancés.





Partout, la même idée prévaut : pulvériser les garanties collectives et individualiser les droits. Chacun capitalisant les maigres aumônes du système, seul face à la machine à broyer capitaliste. « Ubérisation à tous les étages ! » La triste domination du « chacun pour soi », vivier de toutes les idées exécrables de rejet de l’autre, fossoyeur de toute possibilité d’un futur d’égalité, d’entraide et de liberté réelle. Dans ce contexte, le premier devoir des militants anarchistes conséquents est de donner de la clarté, d’évacuer les confusionnistes professionnels ou amateurs qui pullulent toujours dans ces périodes troubles. Le second est de préserver et de développer les outils de résistance. En ce sens, tout doit être fait par exemple pour aider les mandaté-e-s de la Fédération anarchiste qui défendent, contre vents et marées, la maison commune. Le troisième est de se battre pour promouvoir les luttes et les solidarités interprofessionnelles, la reprise en main des syndicats contre les bureaucraties. Alors, seulement, nous pourrons dire aux tenants du pouvoir économique, politique et médiatique, « Tchao pantins ! ».
PAR : Maurice, groupe La Sociale
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