Littérature > PAGES D’HISTOIRE N°67
Littérature
par Sylvain Boulouque le 6 octobre 2024

PAGES D’HISTOIRE N°67

Lien permanent : https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=8040


Algérie 1830 : la première guerre coloniale
C’est une véritable somme que propose Alain Ruscio sur la conquête de l’Algérie. Ce spécialiste de l’histoire coloniale est l’auteur de nombreux ouvrages sur le PC et les guerres d’Indochine et d’Algérie et sur la culture coloniale, notamment à travers la chanson. Il publie une vaste fresque sur l’annexion de l’Algérie entre 1830 et 1852. Si elle commence officiellement le 14 juin 1830 lorsque les soldats français prennent pied à Sidi-Ferruch, Ruscio montre à raison que la volonté expansionniste de la France existe bien avant. Il remonte aux projets avortés de Napoléon Bonaparte puis de Louis XVIII. Il s’agit de concurrencer l’expansion ottomane et de prendre pied de l’autre côté de la Méditerranée. Il prend comme prétexte les actes de piraterie pour faire débarquer les troupes françaises. S’en suit une guerre de conquête, tragique et sanguinaire. La prise d’Alger et la reddition de la ville ne sont que la première étape. Entre 1830 et 1834, la France tente de mettre au pas l’Algérie, légiférant sur ordonnance et imposant un ordre martial aux populations annexées. Très vite, des Algériens dénoncent la colonisation, à l’image de Hamdan Khodja, un homme d’affaires d’origine turque, qui dans plusieurs textes dénonce la brutalité et l’arbitraire français. Désigné comme négociateur, il profite de son statut pour organiser les premières résistances armées. Ruscio pointe avec raison que ce refus de l’occupation n’a pas été conduit par le seul Abd-el-Kader, mais aussi par Ahmed Bey, même si ce dernier après plusieurs mois a tenté de négocier.




La première phase de la colonisation s’est accompagnée en métropole de la naissance d’un véritable parti colonial, mais aussi de quelques voix opposées à la conquête et aux exactions. Il cite ainsi le député Amédée Desjobert qui durant toute la monarchie de juillet n’a eu de cesse de condamner la forfaiture. Les voix et les oppositions ont été rares, même Victor Hugo, qui a dénoncé les exactions militaires, n’en a pas moins fait l’apologie de la mission civilisatrice. Les nouvelles défaites d’Abd-el-Kader en 1847 et Ahmed Bey l’année suivante ont temporairement mis fin à toute velléité d’indépendance. La deuxième phase de la colonisation entre 1840 et 1852 s’est avérée encore plus brutale et sanguinaire. Elle est estimée à près de 600 000 victimes liées à la violence de l’armée, aux expulsions massives des populations, aux épidémies. Elle est appuyée par les intellectuels libéraux alors proche de la monarchie de juillet comme Alexis de Tocqueville ou Alphonse Lamartine. Les voix dissonantes sont quasi inexistantes. L’occupation a été aussi coûteuse pour la métropole, près de 100 000 hommes ont perdu la vie certains dans les combats, mais également en raison des différentes maladies qui les ont frappés. C’est après cette seconde phase que commence le peuplement par les métropolitains de l’Algérie (allant des ouvriers volontaires aux propriétaires terriens en passant par les conscrits de la révolution de 1848 obligés de quitter la métropole). Le pays est alors mis en coupe réglée. La France a gagné cette première guerre, qui annonce une deuxième phase de conquête, tout aussi sanguinaire.
Alain Ruscio livre une remarquable étude expliquant le colonialisme et sa réalité.

La première guerre d’Algérie
Alain Ruscio
La Découverte 2024 774 p. 29,90 €
PAR : Sylvain Boulouque
SES ARTICLES RÉCENTS :
PAGES D’HISTOIRE N°74
PAGES D’HISTOIRE N°73
PAGES D’HISTOIRE N°72
PAGES D’HISTOIRE N°71
PAGES D’HISTOIRE N°70
PAGES D’HISTOIRE N°69
PAGES D’HISTOIRE N°68
PAGE D’HISTOIRE N°66
PAGES D’HISTOIRE N°65
PAGES D’HISTOIRE N°64
PAGES D’HISTOIRE N°63
Claire Auzias, la voyageuse de l’histoire
PAGES D’HISTOIRE N°62
PAGES D’HISTOIRE N°61
PAGES D’HISTOIRE N°60
PAGES D’HISTOIRE N°59
PAGES D’HISTOIRE N°58
PAGES D’HISTOIRE N°57
PAGES D’HISTOIRE N°56
PAGES D’HISTOIRE N°55
PAGES D’HISTOIRE N°54
PAGES D’HISTOIRE N°53
PAGES D’HISTOIRE N°52
PAGES D’HISTOIRE N°51
PAGES D’HISTOIRE N°50
PAGES D’HISTOIRE N°49
PAGES D’HISTOIRE N°48
PAGES D’HISTOIRE N°47
PAGES D’HISTOIRE N°46
PAGES D’HISTOIRE N°45
PAGES D’HISTOIRE N°44
PAGES D’HISTOIRE N°43
PAGES D’HISTOIRE N°42
PAGES D’HISTOIRE N°41
PAGES D’HISTOIRE N°40
PAGES D’HISTOIRE N°39
PAGES D’HISTOIRE N°38
PAGES D’HISTOIRE N°37
PAGES D’HISTOIRE N°36
PAGES D’HISTOIRE N°35
PAGES D’HISTOIRE N°34
PAGES D’HISTOIRE N°33
PAGE D’HISTOIRE N°32
PAGE D’HISTOIRE N°31
Page d’histoire n° 30
Page d’histoire n° 28
page d’histoire n°29
page d’histoire n°27. Ou presque...
Page d’histoire n°25
page d’histoire n°24
Polar d’histoire (23)
Page d’histoire (22)
Page d’histoire (21)
Page d’histoire (20)
Page d’histoire (19)
Page d’histoire (18)
Page d’histoire (17)
Page d’histoire (16)
Page d’histoire (15)
Page d’histoire (14)
Page d’histoire (13)
Page d’histoire (12)
Page d’histoire (11)
Page d’histoire (10)
Page d’histoire (9)
Page d’histoire (8)
Page d’histoire (7)
Histoire d’affiches
Page d’histoire (6)
Page d’histoire (5)
Pages d’histoire (4)
A jamais gravés
Ce vieux Nouveau monde...
Pages d’histoire (3)
Pages d’histoire (2)
Pages d’histoire
Les voix de leurs maîtres
Amour, anarchie …
Marqueuse d’histoires
Voyage au coeur de la propagande
A propos de Perón
Une double proposition de lecture
Deux livres
Rédac sur les réacs
Vous me trouverez bien un complot ?
C’est dans la rue...
Des nouvelles de Debord
Une autre vision sur la Russie et l’URSS
Le refus de Camus
Rêveur d’anarchie…
Femmes de l’extrème droite
Vox populiste
BD r’portage
Общая положительная оценка, товарищ Жорж ?
Le menteur d’histoire
Flora Tristan, aventurière de l’émancipation
Se rappeler de Michel Morphy
Soyons féroces avec les bouffeurs d’hostie
Au travail !
Emma
Emile
Portraits de staliniens
La mémoire d’un vaincu ?
Les filles du Kurdistan Une révolution féministe
Joe Hill
Terreur d’État en URSS
Francisco Ferrer, assassiné par l’Église avec la complicité de l’État
Le coin-lecture du 15 mars
Réagir à cet article
Écrire un commentaire ...
Poster le commentaire
Annuler