L’Homme, meilleur ami du cheval

mis en ligne le 14 octobre 2010
La presse régionale quotidienne apporte parfois quelques surprises qui la rendent intéressante à parcourir. Dans Ouest-France daté du mercredi 22 septembre 2010, édition Saint-Lô et Coutances, on put lire un article titré « Un labo d’autopsie très à cheval ». Un titre qui suscite quelque peu la curiosité ; c’est un peu le rôle d’un titre, non ? Une présentation rapide dit que « près de Dozulé, l’Institut de pathologie équine pratique 300 autopsies par an. Il dispose d’un labo flambant neuf ». Rien de bien méchant, en effet le secteur équin est un secteur économique important dans la région de la Basse-Normandie et comme tout secteur économique, il nécessite des infrastructures comme des laboratoires de recherche, voire, pourquoi pas, des centre d’autopsie afin de mieux connaître les causes de décès des chevaux ; une meilleure connaissance de la biologie peut amener des progrès au niveau des soins, des médicaments, des techniques d’élevage. Puis juste en dessous de l’article, cette précision : « 2,2. C’est le coût en millions d’euros de cet équipement. En moyenne, une autopsie de cheval coûte 1100 euros. Mais grâce aux aides, notamment de la région, qui a déjà investi 14 millions dans ce site, elles sont facturées 150 euros. » Que l’équipement coûte 2,2 millions d’euros, pourquoi pas ? Qu’une autopsie de cheval coûte 1100 euros, pourquoi pas ? Mais là où ça devient choquant, c’est dans la suite. La région paye pour des autopsies en plus d’avoir participé aux investissement du site. On rembourse donc 1100 — 150 = 950 euros aux propriétaires de chevaux. Claire Laugier, la directrice de l’Institut, indique : « Nos clients sont des directeurs de haras, des propriétaires, vétérinaires ou assurances. » Alors qu’il est de bon ton dans les discours politiques de dire qu’il y a des trous dans la Sécurité sociale, qu’il devient difficile de financer les hôpitaux, de rembourser les frais de soins à des êtres humains, nous trouvons de l’argent public pour financer des installations pour chevaux, rembourser des riches déjà couverts par le bouclier fiscal, ceux-là mêmes qui ne veulent pas payer d’impôts mais demandent qu’on les aide à faire face aux coûts induits par leurs richesses ou signes extérieurs de richesse. Ne voit-on pas le scandale qu’il y a derrière tout ça, et en plus on va nous faire croire, à nous les contribuables, qu’il faut faire des efforts supplémentaires en matière de fiscalité pour aider la région à subvenir à tous ses besoins. On laisse crever des êtres humains dehors, dans le froid et le dénuement, on chasse des squatteurs des lieux qu’ils ont investis pour y créer une dynamique sociale mais on dorlote les propriétaires de chevaux. Ce sont bien des choix de société, aider les riches et laisser crever les pauvres tout en prenant l’argent dans les poches des contribuables des couches populaires et des classes moyennes.
À l’heure, donc, où le gouvernement cherche à réduire le déficit de la Sécurité sociale (même s’il a annoncé que la réforme était reportée, ce qui ne veut donc pas dire abandonnée), est-il digne de subventionner les autopsies d’un cheval mort ou bien de subventionner une installation d’imagerie sur les affections locomotrices de ces braves animaux quand on veut faire payer plus et encore plus les malades pour réduire le trou de la Sécurité sociale ? Eh oui, les chevaux ont droit à un Centre d’imagerie et de recherche sur les affections locomotrices équines (Cirale, quel bel acronyme !) à Goustranville. Est-il acceptable de subventionner des installations s’adressant à des animaux et à leurs propriétaires (riches) alors qu’on laisse mourir des êtres humains qui ne peuvent pas recevoir de soins faute de moyens et de solidarité de la part de la société ? Est-il normal de subventionner ces installations alors qu’on restructure le secteur de la santé en supprimant des maternités de proximité, qu’on supprime des centres hospitaliers de proximité pour rationaliser les soins ? Poser ces questions, c’est déjà y répondre : non !
Pour les tenants du pouvoir et les riches, ces questions ne se posent même pas, ils ont choisi leur camp ; pour eux, la spoliation des richesses sociales et l’inutilité de l’être humain au détriment de valeurs sociétales que nous défendons : la dignité humaine, et la solidarité dans l’égalité et la liberté, pas la liberté des libéraux et/ou libertariens.
Alors, pas d’argent pour la Sécurité sociale, pas d’argent pour les retraites, pas d’argent pour payer les fonctionnaires (excluons les policiers, militaires et autres mercenaires et parasites au service du pouvoir et des capitalistes), mais de l’argent pour du futile et pour les riches, pour les chevaux, qui d’amis de l’homme seraient devenus ses ennemis, qui de bêtes de somme et de trait sont devenus plus importants que l’être humain, lui qui sera bientôt rangé dans le placard des objets inutiles. Quelque chose est vraiment pourri dans notre société !