Où se situent les anarchistes sur l’échiquier politique ?

mis en ligne le 15 novembre 2012
Selon la réponse, découleront grilles d’analyses, schémas de pensée, postures, propagandes, slogans, milieux où militer, choix des luttes, et de fait, échecs ou réussites en termes politiques. C’est-à-dire influence croissante ou non de leurs idées sur la société. On conçoit que la question soit d’importance.
Les anarchistes se situent-ils à la gauche de la gauche de la gauche ? Je l’ai longtemps pensé. Comme je venais de la « gauche de la gauche », ça ne me faisait qu’un petit pas de côté… Je suis désormais persuadé que cette perception est un piège dans lequel nous nous enfermons. à la gauche de la gauche – la révolution tardant à venir –, la préoccupation majeure, c’est d’influencer la gauche. Peser sur les choix du parti d’à côté qui est plus gros, plus puissant. Faire pression, dans les luttes, aux élections, parfois piquer des militants aux autres, le plus souvent distiller des idées. Alors à la gauche de la gauche de la gauche, on ferait quoi ? Influencer LO, NPA ou Front de gauche ? Pas vraiment. Soit. Le PS ? Que nenni. Reste quoi ? La droite, l’extrême droite… T’es pas ouf ! ? Alors tous les non-militants, mais qui n’en pensent pas moins, ceux que la politique ennuie ? On peut faire un inventaire à la Prévert…
Bon et maintenant regardons la propagande anarchiste dans les yeux et dites-moi à qui elle s’adresse ? Au premier coup d’œil, elle est repérable comme anarchiste ? Oui ? Dommage, fallait pas. Quel individu de droite la prendra, la lira et sortira de sa lecture interloqué, surpris, ébranlé ? Vous pouvez remplacer « de droite » par « de gauche » ou « de rien du tout », si cela vous rassure. Mais je maintiens que nous devons influencer aussi à droite. Vous pouvez aussi substituer « voir » ou « écouter » à « lire ». La question reste celle-ci : nous adressons-nous aux anarchistes, ou à tous ? Pourtant, la société moins injuste, plus démocratique – je n’arrive plus à écrire « idéale » –, elle se construit avec les gens… donc faut bien s’adresser à eux, non ? Tous, pas seulement ceux qui nous sont déjà proches. S’il faut résister à l’idéologie dominante, et lui opposer d’autres idées, d’autres analyses, d’autres mœurs, d’autres pratiques, le champ de bataille est l’ensemble de la société, pas un microcosme.
Avec le temps, nous avons intégré la grille de lecture de la vie politique qui nous marginalise, nous y complaisons-nous ? Sauf à servir d’épouvantails quand le pouvoir l’estime nécessaire.
Quand prendrons-nous l’initiative ? Quand impulserons-nous le tempo, plutôt que de suivre celui que d’autres imposent ? Quand nous concentrerons-nous sur l’essentiel, ce qui nous distingue de tous les politiciens et de tous les politiques ? Comme dit ma grand-mère : « Faut un nouveau Mai 68 ! » Oui. Et pas pour le pavé dans la gueule du flic, pour l’influence libertaire dans les années qui suivirent. Pour les remises en cause des pouvoirs dans tous les domaines de la vie sociale. Pour les têtes qui se relèvent, les yeux qui pétillent et les discussions spontanées avec des inconnus. Pour la réflexion qui s’empare de chaque aspect du quotidien.
Nous ne ferons pas cela seuls, nous en sommes incapables et nous y sommes opposés. Nous nous refusons à être un parti dont il faudrait suivre les consignes lancées par une poignée de dirigeants. Nous savons qu’il y a là en germe la dictature future. Mais le seul antidote à une dictature, ou à de nouveaux reculs sociaux, ce sont les gens. Nommez cela comme vous voulez : révolution, retour de balancier, fin de la période de régression, changement de paradigme, ce sera une somme d’actes, de pensées, d’expériences, de relations… Tout est en germe déjà aujourd’hui, dans les domaines les plus divers, et nous n’en sommes ni les auteurs, ni les initiateurs. C’est cela (ceux-là) qu’il nous faut fédérer. C’est à ceux-là que nous devons nous adresser, si nous avons quelque chose d’intéressant à proposer.



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


toglu

le 27 janvier 2013
Salut à tous,
Je me permet de participer à ce forum, même si je n'ai pas l'habitude de tailler le bout de gras sur internet. Si je le fait c'est parce que je suis tellement désespéré par ce que je vois autour de moi que je ne sais plus trop où dire ce que j'ai à dire.D'abord il y a le fait que la plupart des anars que je connais se prennent pour des génies. Je sais, ça fait un peu rude comme début, mais c'est vrais de tout militant politique : ses idées sont les bonnes et sont la lumière...Pour autant, se rendre compte que ce monde est pourri est à la portée de n'importe qui. Se rendre compte que le patron abuse aussi, enfin quoi ! on est au XXIe siècle et une foultitude de façon de s'en apercevoir est accessible.
Ensuite il y a le problème du prolétariat :aucun anar que je connais ne veut en être et pourtant c'est son soulèvement qu'ils désirent.
Il faudra qu'un jour on m'explique comment transformer une société d'exploités sans faire partie des exploités."Subir l'exploitation c'est pour les autres" me semble un bon résumer.en fait ce que j'ai vu surtout, ce sont des gosses de riches bien éduqués (minimum bac+3) (la plupart se rapprochent aujourd'hui de la trentaine et sont toujours aux basque de leurs parents d'une façon ou d'une autre). Ils justifient leur paresse en invoquant leurs précieuses idées libertaires mais ne sont en fait intéressés que par leurs loisirs. (je sais c'est rude, mais c'est ce que je vois en tout cas à paris).Il y a pour moi un grand problème d'autonomie chez ceux qui se disent libertaires ou anars que je connais. J'en rajoute une couche :Ils se font pardonner leur attitude bourgeoise en militant dans des orgas anarchistes et/ou libertaires ; il serai temps que ces orgas réagissent et refusent les gens qui veulent que l'anarchie soit un refuge pour marginaux et non le futur de l'humanité. qu'elles démasquent ces bourgeois déguisés! Voilà, j'espère des réactions et suis ouvert au débat.Vive l'anarchie !

Anonyme@anonyme

le 11 mai 2014
Je ne suis pas d'accord avec Toglu:
Il faudrait-donc démasquer les "bourgeois" au sein des mouvements anarchistes?
Il faudrait refuser une catégorie de sympathisants sous prétexte qu'ils sont nés dans une famille bourgeoise?
Pourquoi pas soumettre un formulaire à chaque militant anarchiste?
Pourquoi pas créer une police secrète?
Je sais, je caricature ce que vous avez dit, mais c'est à cela que j'ai pensé en vous lisant.
Les anarchistes (libertaires et anarchistes sont synonymes, je crois) sont contre toute forme de pensée unique et sont ouverts à tous les milieux sociaux.
N'oublions pas que nombres de penseurs libertaires ont été des "bourgeois". Que nous sommes très nombreux à être bourgeois ET anticapitalistes.
Peut-être que certains militants sont paresseux, ou ont quelques idées toute-faites sur le prolétariat. Mais ce n'est pas une raison pour les chasser ou les mettre à l'écart.
Les idées toutes-faites et les préjugés doivent être combattu par l'information, le débat, la discussion.
Nous devons être ouvert à tous et à toutes. Ne refuser personne.
Nous devons diffuser nos idéaux pour nous faire le maximum d'alliés, de sympathisants et d'adhérants.
La révolution se fera par une masse hétérogène, un mélange d'individus venus de tout les horizons.
Ce ne seront pas les organisation révolutionnaire, libertaires ou non-libertaires, ce ne sera pas non plus les syndicats, révolutionnaires ou pas, ni les partis et politiciens mais le peuple.
Le peuple, c'est-à-dire les salariés, les petits patrons, les indépendants,les étudiants, les chômeurs contre les magnats de la finance, les industriels, les actionnaires et leurs complices du monde politique.

Si cette révolution veut réussir, elle devra cultiver la différence, moteur de la liberté.