En finir avec la prostitution

mis en ligne le 14 novembre 2013
Contrairement à ce que certaines personnes peuvent prétendre, on ne peut pas mettre sur un même plan les prostituées et leurs clients (car il s’agit évidemment, dans l’immense majorité, de prostituées femmes et de clients hommes). Ils et elles n’ont pas d’intérêt commun. Ils et elles sont dans une relation inégalitaire : soumission des prostituées et domination des clients.
Certaines personnes tentent d’assimiler la prostitution à un travail comme un autre : vendre son « cul » serait la même chose que vendre ses bras, sa tête. Cette comparaison s’appuie sur le fait que nous serions tous et toutes les « putes » de nos patrons. Ce radicalisme verbal qui vise à se réapproprier des paroles insultantes et stigmatisantes ne doit pas nous faire perdre de vue une analyse concrète.
La prostitution est bien basée sur une relation inégalitaire (tout comme une relation employé-patron est inégalitaire) et de soumission, de domination, d’exploitation, voire de violence. C’est pour cela que les anarchistes ne peuvent pas défendre la création d’un statut de « travailleurs/travailleuses du sexe ».
C’est aussi sur ces bases de rejet de toutes les formes de violence et d’exploitation que nous condamnons le viol (y compris conjugal), l’inceste, et que la justice retient le terme de personnes ayant autorité (par exemple, un prof sur une élève). Il n’y a pas d’égalité ni de liberté, mais des cas de sujétion, de violence, de pression affective ou autre.
Les anarchistes doivent condamner la prostitution, ce qui ne veut pas dire condamner les prostituées. Nous avons à être à leur côté pour leur apporter aide et soutien en cas de besoin, lutter contre leur criminalisation (contre les lois Sarkozy, entre autres). Cela n’implique pas la reconnaissance et la légalisation du statut de prostituée, de la prostitution.
À l’inverse, nous devons être favorables à la criminalisation des clients (amendes, TIG, etc.). Et que l’on ne vienne pas me dire que, en tant qu’anarchistes, nous ne pouvons pas défendre cette position car nous sommes contre les sanctions, contre la police, les tribunaux, etc. Nous savons très bien porter plainte contre des patrons, contre des flics, des fachos en cas d’agression et d’atteintes à nos droits et libertés.
Et l’anarchie ne signifie pas l’absence de « lois », de règles communes, d’interdits (inter-dits : dits entre nous = acceptés). Nos interdits fondamentaux sont l’exploitation d’autrui, la domination, la violence sur autrui. Nous sommes pour la liberté effective, l’égalité économique et sociale, pour l’entraide, la solidarité, le mutuellisme, la réciprocité. Sur ces quelques principes, nous construisons un ensemble de règles communes de vivre ensemble, d’organisation, de prise de décision, etc.
La position maximaliste des anarchistes doit être abolitionniste : pour l’abolition de la prostitution. Sous prétexte d’anarchisme, on ne peut pas accepter tout et n’importe quoi. Et ce n’est pas parce que quelque chose est combattu par la société qu’il faut le défendre (et encore, s’agissant de la prostitution, il s’agit plutôt de l’organisation d’un système d’exploitation et de violence plus ou moins géré avec l’approbation des différents pouvoirs).
Celles et ceux qui mettent sur le même plan le travail salarié et la prostitution font, selon moi, preuve de malhonnêteté intellectuelle.
Les syndicats étudiants dénonçaient dernièrement l’obligation faite à certaines étudiantes de se prostituer occasionnellement afin de boucler leurs fins de mois. Est-ce un véritable choix ? Est-ce pareil que de bosser au MacDo ou de faire les cantines ? Si elles avaient la possibilité de faire leurs études tranquillement, se prostitueraient-elles ?
L’amour libre que défendent les anarchistes s’oppose à la sujétion économique (par exemple, les femmes au foyer qui ne peuvent pas gagner leur autonomie financière, qui vivent sous la coupe de leur mari), contre les modèles préétablis. On peut vivre seul ou seule, en couple, en groupe, avoir des relations multiples, uniques, pour une heure, un jour, une semaine, un an, une vie. On peut s’unir et se séparer librement. Tout cela tant que sont respectés nos principes d’égalité, de liberté et de réciprocité.
Sur ces questions et d’autres, il y a bien une « scission » entre des « groupes radicaux » (une radicalité des discours plus que des pratiques) et d’autres courants égalitaires. Ce n’est peut-être pas « radical » de s’occuper d’un centre d’accueil pour femmes battues, d’assurer des formations professionnelles, mais c’est vital pour de nombreuses femmes. Quand dénoncerons-nous les violences faites aux femmes qui conduisent à la mort de centaines d’entre elles chaque année ?



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


Michaël Degreef

le 1 décembre 2013
"Est-ce pareil que de bosser au MacDo ou de faire les cantines ? Si elles avaient la possibilité de faire leurs études tranquillement, se prostitueraient-elles ?"

Et si elles avaient la possibilité de faire leurs études sans travailler au McDo, ne le feraient-elle pas? Vous ne démontrez rien avec cet article, rien du tout. Oui, le travail salarié et la prostitution sont à mettre sur le même pied. Dans les deux cas, l'individu utilise une partie de son corps en échange d'argent. Qui m'expliquera enfin, pourquoi vous vous intéressez à l'utilisation du vagin plus qu'à celle des bras, des jambes ou du cerveau? Allez, quoi, lancez-vous... Ah, et lisez Stirner, une fois! Fourier a un peu trop vieilli!