À la cloche de bois

mis en ligne le 17 décembre 2009
Vous l’aurez sans doute ressenti – du moins remarqué – le froid s’est abattu sur Paris (et dans beaucoup d’autres endroits…), nous faisant ressortir manteaux, gants, écharpes, bonnets et allumer nos radiateurs pour vivre au chaud.
Malheureusement, il n’en est pas ainsi pour tout le monde. Combien dorment encore ce soir dans la rue, recroquevillés sous une couverture trouée, soufflant un peu de chaleur corporelle sur leurs mains dans l’espoir (bien mince) de se réchauffer ? Combien, encore – déjà écrasés par le poids financier de leur loyer – ne peuvent se permettre de mettre en route un radiateur ? Ces odieuses réalités font ressurgir un problème essentiel et vital, celui de l’accès au logement.
Au risque de paraître simplet ou niais, un toit décent et chauffé (ou climatisé en fonction du climat) ne devrait-il pas être un acquis gratuit pour chacun ? La possession individuelle d’un logement décent à soi, garantissant une intimité indispensable à l’épanouissement de l’individu et une protection contre les caprices du climat ou des humains, est un droit inaliénable, qu’on ne devrait pouvoir ni refuser ni retirer à personne.
Et pourtant, aujourd’hui en France, selon l’Insee, plus de 86 000 personnes vivent sans domicile fixe (dont plus de 15 000 sont constamment dans la rue, l’hiver compris) alors que, ne serait-ce que sur Paris, plus de 100 000 logements demeurent vides et inoccupés, chiffre auquel on peut aussi ajouter plusieurs milliers de km² de bureaux inutilisés. Toujours selon l’Insee, 200 000 personnes seraient hébergées dans des habitats précaires et temporaires (à l’hôtel, chez des proches, en habitat de fortune) et 2 millions dans des « logements dépourvus du confort sanitaire de base ». L’hiver dernier (2008-2009), selon Emmaüs, 269 « sans-domiciles » sont morts de froids en France. Combien encore vont-ils mourir cette année ?
Pour dénoncer concrètement et efficacement cet état de fait, l’hiver est une période propice, la trêve hivernale (qui s’étend du 1er novembre au 15 mars) interdisant aux propriétaires d’expulser qui que ce soit d’un logement. C’est donc le bon moment pour que les personnes sans-domiciles occupent les logements vacants et/ou s’installent dans n’importe quels bâtiments inutilisés ou laissés à l’abandon. Quant à nous, chanceux locataires, organisons-nous pour ne plus payer nos loyers. Pour ceux qui n’ont tout simplement pas les moyens de financer leur toit, attendez la fin de la trêve hivernale sans rien donner et déménagez à la cloche de bois, furtivement et sans prévenir le proprio.
Montrons ainsi à l’État et aux propriétaires que le droit au logement individuel n’est pas discutable mais bel et bien vital, qu’il ne se mendie pas mais qu’il se prend !