Suicides à l’éducation nationale : nouveaux dégâts de l’impasse salariale

mis en ligne le 31 mars 2011
Depuis ce début d’année 2011, plusieurs suicides et tentatives de suicide ont touché le personnel de l’éducation nationale. Dans la seule Normandie, on en compte pas moins de trois en l’espace de deux mois. Un instituteur de la région de Granville (Manche) et un enseignant du lycée Charles-Tellier de Condé-sur-Noireau (Calvados) ont, en effet, mis fin à leurs jours au mois de janvier et février. Du côté de Caen, c’est un technicien d’un lycée qui a également tenté de se suicider récemment, heureusement en vain.
Dans la lettre qu’il a rédigée avant de passer à l’acte, Bruno Simon, l’enseignant du lycée Charles-Tellier, pointait du doigt l’éducation nationale comme en partie responsable de son geste : « Mon long passage dans l’éducation nationale n’a rien cassé (excepté moi). Mes colères n’ont rien changé, je n’ai plus de force. Alors, je pars. » Quant au technicien caennais, il disait avoir été poussé à bout par sa hiérarchie. Même s’il est fort probable qu’il y eut également des raisons personnelles à ces suicides et tentatives, il n’en reste pas moins que ces fonctionnaires ont clairement affirmé que leurs conditions de travail étaient loin d’y être étrangères. Et quand on voit la chute libre entamée depuis quelques années par l’éducation nationale, qui semble être de plus en plus soumise à des logiques de management libéral, on a aucun mal à le croire. À l’heure qu’il est, d’après un sondage cité dans l’Humanité, plus de 93 % des enseignants jugeraient leur métier « dévalorisé ».
Cette dévalorisation de la profession ajoutée au stress quotidien (pression des parents d’élèves, problèmes avec la direction, etc.), aux suppressions massives de postes (16 000 prévues pour la rentrée 2011), aux demandes irrationnelles auxquelles sont obligées de se soumettre les enseignants sous peine de retenus sur salaire (évaluations des acquis des élèves, gestion du fichier base-élèves, etc.), aux politiques du résultats (motivées par des primes, versées notamment aux recteurs et proviseurs), à l’implacable mépris du ministère qui se refuse à reconnaître ces problèmes ou qui use de la langue de bois, tout cela témoigne d’une dégradation alarmante des conditions de travail au sein de l’éducation nationale. Dès lors, il n’est pas étonnant que le nombre de suicides chez les seuls enseignants atteigne les 39 cas par an. À vouloir gérer l’éducation comme une entreprise, on finit par obtenir les mêmes dégâts.



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


papy blabla

le 8 avril 2011
Ce que Guillaume GOUTTE dit sur l'ambiance "entreprise libérale" au sein de l' Education Nationale ,donnant donc des suicides annuels d'un peu moins de 40,je ne peux que le comprendre car au sein de l'Hôpital , un certain nombre de suicides existent AUSSI ,non chez les cadres,on s'en doute,mais bien chez les "petits" employés stressés pour soigner de plus en plus de malades avec de moins en moins de personnel et de moins en moins de moyens matériels adaptés aux besoins--maintenance du matériel incluse dans la problématique! Et cela bien sûr dans un contexte hiérarchique très rigide et fort souvent inadapté à ce qu'il faudrait faire pour que les soins soient enfin correctement faits et que les patients ne soient plus des machines aliénées par des logiques comptables imposées par des Agences Régionales de Santé totalement au service du Néo-libéralisme le plus crétin qui soit :mettre le citoyen-au nom de la démocratie- au service de l'Economie reste le critère de l'échec de l'Humain par excellence! En 35 ans de boite,j'ai connu des camarades-brancardiers,Aide-Soignants,ASH,Infirmières qui se sont suicidé,pas toujours principalement à cause de l'Hôpital ,mais ce dernier n'a jamais été étranger à leurs "départs"! Il est vrai que devenir des machines à faire de soins n'est jamais une perspective réjouissante quand on a 25-30 ans! Après,on devient déçus puis soumis ,blasés et cons et la révolte qu'on avait voulue lors de nombreuses manifs nationales devient un simple souvenir , empli toutefois de regret et de rage proches du désespoir! La "réforme" des retraites à Fillon a sonné le glas chez beaucoup de ceux qui espéraient encore un sursaut de liberté collective!Peut-être que la nature humaine est d'aimer être esclave?J'espère sincèrement être dans l'erreur! Salutations fraternelles!