Gender studies

mis en ligne le 9 octobre 2013
1718genderstudiesAux États-Unis puis en France, comme dans de nombreux autres pays, on assiste, depuis les années 1980, à une multiplication des travaux, dans tous les domaines des sciences humaines et sociales, analysant les différences de traitement entre l’homme et la femme, et leurs rôles tels qu’ils sont déterminés par la société. Dans les années 1960-1970, les mouvements féministes américains cherchent à faire entendre leur voix au sein des institutions de recherche, de leurs revues et éditions. Les women’s studies se développent, liées en grande partie au féminisme « radical » teinté de différencialisme.
Le psychologue Robert Stoller popularise en 1968 l’idée qu’il n’existe pas de correspondance entre le genre (masculin/féminin) et le sexe (homme/femme). En 1972, la sociologue Ann Oakley renvoie, quant à elle, le sexe au domaine du biologique et le genre au domaine du culturel. Le rapprochement entre les femmes et la nature, du fait de leurs facultés reproductives, alors que les hommes seraient du côté de la culture, est récusé. Le genre doit être pensé comme une construction sociale. Une fois le genre distingué du sexe, les chercheurs se concentrent sur les rapports entre l’homme et la femme. L’historienne Joan W. Scott nous incite à voir plus loin qu’une simple opposition. Si le masculin et le féminin s’opposent, c’est parce que se jouent entre eux des rapports de pouvoir où l’un domine l’autre.
Le genre peut être défini comme un ensemble de rôles fixés par la société et culturellement variables que les hommes et les femmes jouent dans leur vie quotidienne. Il fait référence à la relation structurellement inégalitaire entre les hommes et les femmes, telle qu’elle se manifeste au niveau micro (au sein de la famille) et au niveau macro (par exemple, sur le marché du travail). Il prend racine dans les valeurs traditionnelles observées par nos différentes sociétés, et a des répercussions sur la loi et les politiques de développement de nos pays. Le genre est une notion dynamique ; il subit l’influence des mutations sociales. Cependant, bien que le genre soit une notion très variable, il renferme un dénominateur commun : l’oppression universelle des femmes ainsi que des gays, lesbiennes et transgenres.
L’approche par le genre se fonde sur le principe de l’égalité entre les sexes et s’appuie sur les constats suivants :
• Les rôles des femmes et des hommes sont socialement construits et ne relèvent pas uniquement de la biologie. Les fonctions physiologiques et biologiques ont longtemps servi, et servent encore, à justifier la division du travail et les différences entre hommes et femmes, mais la division du travail elle-même n’est ni naturelle ni biologique. Les distinctions entre « masculinité » et « féminité » ne sont pas non plus naturelles : elles varient selon les pays, les régions, les cultures et les religions, et peuvent changer au cours de l’histoire.
• Actuellement, le travail quotidien des hommes et des femmes, leur accès aux ressources, leur participation à la vie politique, leur expérience de la violence, leur capacité d’exercer leurs droits diffèrent toujours selon qu’ils appartiennent à l’un ou l’autre sexe.
• Les rapports sociaux de sexe et les rôles assignés aux femmes et aux hommes sont en grande partie déterminés par les structures économiques, la nature de l’État et ses orientations sociales, la religion, la culture, ainsi que par les rapports étroits qu’entretiennent tous ces éléments, rapports qui peuvent eux-mêmes changer.
• Les femmes, tout comme les hommes, ne forment pas un groupe homogène et monolithique.
• La discrimination exercée à l’endroit des femmes et l’oppression qu’elles subissent sont systémiques et se manifestent non seulement dans les relations interpersonnelles, mais aussi dans les structures et le fonctionnement des institutions, dans les relations familiales telles que régies par le droit, aussi bien que de facto.
Le concept de genre a réellement commencé à se diffuser en France au milieu des années 1990. Durant les années 1980, l’université française cherchait à se prémunir contre le politique. De par leur nécessaire passage par le militantisme, les gender studies avaient mauvaise presse. L’approche du genre s’appuie sur l’ensemble de l’organisation sociale de la vie économique et politique. Les détracteurs des gender studies, et ils sont encore nombreux, parlent d’« idéologie du genre ». Les études de genre ne sont ni une idéologie ni une théorie mais un outil d’analyse qui vise à révéler les différences sociales et les inégalités dans les relations entre les hommes et les femmes, un concept rationnel orienté vers une nouvelle forme de socialisation plus égalitaire.