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Cinéma
par Florence B. le 21 janvier 2024

Béziers, l’envers du décor

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Béziers, l’envers du décor (91’ et 97’) de Daniel Kupferstein, 2023



Jadis membre (cantonné dans son bureau) de Reporters Sans Frontières, depuis 2014 maire d’extrême droite de Béziers, Robert Ménard ne concède aucune place à quiconque en dehors de lui-même. Son épouse, députée sans étiquette, est toujours en retrait à son côté, souriante, admirative, muette.
Béziers, l’envers du décor, du cinéaste documentariste Daniel Kupferstein, sort à Paris le 28 février 2024 au cinéma le Saint-André-des-Arts, Paris 6ème .




Effarant coup de poing au plexus en deux parties d’une heure et demie chacune, le film décortique le journal municipal, catholique intégriste et entièrement dédié à l’auto-glorification du maire. Toujours colorisée en bleu-blanc-rouge, la maquette imite Détective le magazine de faits divers. Les encarts, en guise de textes, ne sont jamais signés. Seul le rédacteur en chef est mentionné, Robert Ménard bien sûr ! Les images extraites d’internet, sont détournées à son profit, comme s’il les avait lui-même inventées.


L’image de la femme glorifie une icône de ménagère sexy, toujours disponible au mâle, à la façon des années 1950/60. La caméra se promène en centre-ville où les bancs ont été retirés parce qu’il est interdit de s’asseoir. Regardez et circulez, ne vous arrêtez pas ! La police municipale y veille, dont le budget a explosé de manière exponentielle, à l’inverse de celui de la médiathèque. Ce sont des exemples.

Les Biterrois ne sont pas tous béni-oui-oui. La caméra montre une manifestation de ceux qui résistent, en cortège fourni mais c’est une exception. Les associations souffrent. Il n’est pas bon d’avoir un patronyme à consonance maghrébine. Surtout dans les écoles. D’où le maire sort-il ce chiffre de 65 % d’élèves non français ? Né à Oran, Robert Ménard a la nostalgie de l’Algérie française. Il glorifie quatre activistes de l’OAS à qui il élève une stèle alors qu’ils furent condamnés par la justice pour pratique d’assassinat à la bombe et tentative d’attentat contre De Gaulle.
Élu à la faveur d’un fort taux d’abstentions, ce maire ultra-communiquant fait fi des lois et ment à tour de bras. Preuve par neuf dans le film de Daniel Kupferstein qui tend son micro à un analyste de l’image, à une médiathécaire, à une enseignante de maternelle, à divers associatifs et à une journaliste du Midi-libre.
Pendant la pandémie de Covid, c’est à la faveur du fractionnement de la gauche en trois listes que Ménard a remporté les élections municipales de 2020, avec 300 voix de plus qu’en 2014, mais les vrais vainqueurs sont les abstentionnistes. Ce film projette-t-il un aperçu de ce qui nous pend au nez dans un avenir proche ?

Les deux parties de l’avant-première du film ont été coupées par un entracte. Les spectateurs ont discuté autour d’un vin chaud puis débattu à la fin de la projection. Les trois heures ont passé très vite. Du débat final avec la salle ont émergé quelques questions se résumant par « mais que fait l’État ? » Faut-il en rire, en pleurer, ou … ?

Auteur de la trilogie sur les massacres d’Algériens à Paris : Dissimulation d’un massacre (le 17 octobre 1961) en 2001 et Mourir à Charonne, pourquoi ? (le 8 février 1962) en 2009, puis Les balles du 14 juillet 1953 en 2014 (et dont il a tiré un livre en 2017), Daniel Kupferstein est depuis 1990 un spécialiste des questions qui fâchent. Il fut un familier des regrettés Jean-Luc Einaudi et Maurice Rajfus. En 2019, Pas en mon nom, son précédent documentaire distribué en salles, traitait de la question juive face à la politique de l’État d’Israël envers les Palestiniens. Hélas plus que jamais d’actualité !
Florence B.

https://www.daniel-kupferstein.com/biographie

PAR : Florence B.
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