Chroniques du temps réel > Hier. lundi 6 avril ... suite des chroniques du confinement (3e semaine)
Chroniques du temps réel
par Pierre Sommermeyer and CO le 1 avril 2020

Hier. lundi 6 avril ... suite des chroniques du confinement (3e semaine)

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un journal du confinement qui en finit pas de durer

Mardi 17 mars, midi. Nous entrons dans une période de confinement contraint et nécessaire. Et ça vous fait quoi d’être confiné ? Sur proposition de Pierre, chaque jour un témoignage personnel sur le jour d’avant.



Chroniques au jour le jour

06/04/2020
Comme un lundi
« Le confinement nous rend fous ! » C’est du moins ce que criaient des préadolescents, pourtant si calmes en temps normal. Depuis leur fenêtre, ils lançaient des hurlements stridents qui faisaient sursauter les rares passants dans cette rue à sens unique. Après une hilarité générale cachant mal une détresse profonde, ils parvinrent à trouver un autre divertissement, plus silencieux. On ne les entendit plus de la journée. Cela finit même par m’inquiéter.

Sans soleil, une nouvelle semaine commençait, comme dans un film de Chris Marker. Je devais remettre un article sur le hirak en me plongeant dans mes souvenirs algérois. Une hésitation me traversait néanmoins quant à l’opportunité de mettre en exergue une citation de Hegel : « Le côté négatif de ce spectacle du changement provoque notre tristesse. Il est déprimant de savoir que tant de splendeur, tant de belle vitalité a dû périr et que nous marchons au milieu des ruines. »

Une promenade s’imposait. En sortant de mon appartement de célibataire, je croisais dans le hall une résidente qui paraissait revenir du cortège de tête sanitaire : cagoule sombre, lunettes de natation, masque artisanal, gants en silicone... Je dus me retenir d’éclater de rire pour ne pas la blesser. Après tout, chacun gérait ses angoisses comme il le pouvait dans la République macronienne. Et les hypocondriaques n’avaient pas de leçon à recevoir des inconscients.
Rendu à l’air libre, je remarquais qu’un deuxième drapeau italien était accroché au balcon de l’immeuble adjacent. Avait-on affaire à une manifestation de solidarité ou à une affirmation identitaire ? A quelques mètres de là, un étendard aux couleurs de la Guyane apparut à une fenêtre. Mais aucun emblème français dans le quartier. Ils étaient déjà rares après les attentats de 2015. Le dernier, qui avait terni avec les années, fut d’ailleurs retiré peu avant la pandémie.

Les murs parlaient aussi aux promeneurs solitaires. Je découvris avec soulagement une inscription au marqueur sur un panneau d’information : « On applaudit les soignants, mais pas les gouvernements, ils ont tout privatisé ». Plus loin encore, les mots d’ordre de Lutte ouvrière contre la loi du 23 mars avaient été soigneusement recopiés à la main, sans bavure, comme un instituteur sur son tableau noir. Tant qu’il y aura des militants...

Sur le chemin du retour, je retrouvais le sourire. Des locataires malicieux avaient placardé des affichettes pour composer le mot « bisous » avec des lettres dessinées au crayon de bois, tel un pied-de-nez aux recommandations quotidiennes qui nous somment d’« arrêter les embrassades ». Sur le toit d’une bâtisse désertée, une quadragénaire en tenue de sport faisait les cent pas, seule, les yeux dans le vague. Quelques jours plus tôt, elle effectuait le même rituel avec son compagnon. C’était alors une autre femme : amoureuse, rayonnante et tactile.
Face à mon écran, je reprenais mon texte sur le mouvement populaire en Algérie. Je décidai de me passer de Hegel à cette occasion, malgré la justesse du propos, pour finalement m’appuyer sur Günther Anders : « Mon principe est : s’il existe la moindre chance, aussi infime soit-elle, de pouvoir contribuer à quelque chose en intervenant dans cette situation épouvantable, dans laquelle nous nous sommes mis, alors il faut le faire. »
Nedjib SIDI MOUSSA

05/04/2020
Aujourd’hui, 5 avril, 18e et demi jour de confinement. Le demi -jour c’est le premier quand je suis rentré dare-dare de la montagne pour me retrouver chez moi à la campagne.
Le confinement dans ma demeure qui est grande et qui ouvre sur les bois et les champs dans cette belle campagne provençale n’est pas difficile à vivre et je serai le dernier à me plaindre.
En fait on est très libre mais cette liberté qu’est-ce que j’en fais? Est-ce que je l’utilise bien? Hier j’ai réalisé que je m’enfonçais dans une espèce de fainéantise complaisante, que je me levais de plus en plus tard et que je n’avançais pas dans mes travaux. C’est très mauvais pour ma santé mentale. Le sommeil est l’axe de la santé. Il n’en faut pas trop non plus. De plus je prends du poids et l’exercice quotidien allié à de la nourriture trop grasse, trop sucrée, me donne des muscles mais aussi du lard. Pas bien du tout.

J’en profite cependant pour réfléchir sur le monde et sur les mille sujets de réflexion que me suggèrent la lecture des journaux, les partages avec les amis libertaires sur Facebook ou autre, la correspondance avec des copains et collègues, les vidéo des petits-enfants.... C’est un flux incessant que je dois endiguer sauf à y être noyé.

Je dois dire aussi avant d’aller plus loin que personne dans mon entourage n’est directement touché par le virus. On patiente un jour à la fois.

Et donc le sujet aujourd’hui c’est la navigation comme métaphore de la vie. Voilà une demi-douzaine d’années que je navigue sur un voilier acheté en 2014 et je suis toujours étonné de constater que l’enseignement de la vie en mer vaut presque toujours parfaitement pour la vie en général. Ou même en particulier, à savoir le confinement.

Apprendre la navigation c’est trois choses différentes.

D’abord la navigation proprement dite (la manœuvre, la lecture de cartes, l’emploi du compas, de la règle de Cras, des amers, la météo, les marées, les courants, l’entrée et la sortie de port, l’amarrage, le mouillage, le réglage des voiles, tenir un cap, etc. etc.).

Ensuite il y a l’entretien et les réparations (il faut être plombier, menuisier, électricien, électronicien, mécanicien, réparateur en tout genre, faire du matelotage, c’est-à-dire couture des voiles, épissures, etc. etc.). Là, entre parenthèses, je suis nul.

Enfin il faut apprendre à vivre sur un bateau, c’est-dire vivre avec les autres (ou seul si on navigue solo), partager, se montrer discret, prendre sur soi, être responsable du bateau. Et là chacun est responsable de tous les autres, chacun est responsable du bateau parce qu’entre soi et le fond de l’eau il n’y a qu’une mince coque de plastic ou de bois et qu’une négligence peut noyer tout le monde. Sur une longue traversée c’est simple: ou bien l’équipage s’entend bien et c’est le paradis, ou il s’entend mal, voire très mal, et c’est l’enfer.

Pas besoin je suppose d’expliquer comment ça s’applique à notre situation dans l’épidémie, au confinement, au souci des autres, au respect des règles de prudence.

C’est très libertaire aussi pour une autre raison. On apprend la différence entre le pouvoir et l’autorité. Nous les libertaires je crois on respecte l’autorité mais on ne veut pas du pouvoir. Sur un bateau il y a un capitaine, un skipper. C’est un chef si on veut, mais pour la manœuvre, pour les décisions à prendre en fonction d’une connaissance acquise après une longue pratique. Réduire la toile? changer de cap? rentrer au port? mettre au moteur? C’est lui (elle si le skipper est une femme, oui oui il y en a beaucoup !) qui décide parce qu’on ne peut pas attendre, procéder à des débats, il faut que la décision intervienne rapidement et s’appuie sur l’expérience et le savoir du skipper. Mais, après, le skipper n’est chef de rien. Il veille à la sécurité de l’équipage et à la bonne marche du bateau, en dehors de cela chez les plaisanciers en tout cas, il est chef de rien du tout. Ou alors ça finit à coups de manivelles de winch dans la gueule. Ca vous parle?

La vie en équipage sur une longue traversée (deux semaines ou plus) ça apprend beaucoup sur la vie, sur les relations humaines, c’est une sorte de pratique de l’anarchisme, une vraie école de moralité libertaire: partage, coopération, égalité, distribution des responsabilités, patience, respect et souci de l’autre, humilité...

La navigation donne des leçons sur bien d’autres aspects de la vie. On est dans un environnement immensément dangereux et on apprend l’humilité. On apprend qu’on est peu de chose, que d’autres savent mieux, on apprend le courage. Quand je revenais d’Islande avec mon pote Eric (que je compare toujours à Moitessier), quand on se prenait des déferlantes comme des charges de camion, quand j’étais tellement frigorifié que je pouvais à peine bouger, lui, il faisait la cuisine. On apprend que la dépendance, celle qui permet de vivre, pas de mourir, c’est la base de notre vie de petits animaux égoïstes qui doivent apprendre l’entraide et la solidarité pour survivre. C’est ça, on apprend l’humilité qui n’a rien à voir avec l’humiliation. L’humilité rend fort, tandis que l’humiliation, si présente dans notre société de petits chefs, détruit. On apprend le respect qui n’a rien à voir avec la servilité.

La mer est grande, c’est vrai, mais il y a d’autres bateaux. Quand on reçoit un mayday (un SOS), si on est sur zone, c’est un devoir, une obligation, d’aller au secours de ceux qui appellent à l’aide. C’est la loi de la mer. La communauté des navigateurs est interdépendante. Pourquoi porter un masque ? D’abord pour protéger les autres.

Oui, naviguer c’est toujours une leçon de vie et je pourrais continuer comme ça longtemps, sur l’entraide, sur l’amour de la nature et le respect de l’environnement, sur la découverte du monde et l’émerveillement devant les choses de la vie, sur les rencontres dans les ports et sur l’amitié spontanée entre marins, et puis sur cette vérité qu’il y a plus de choses sous le ciel que dans tous les livres. Là aussi belle leçon d’humilité pour un intello.

Allez, bon vent à toutes et à tous.

Charles Macdonald

04/04/2020
4 avril 2020, il est 20 H 40. Je pense à mon père, demain c’est la date anniversaire de sa mort, il y a déjà bien longtemps mais je ne compte pas les années ni les heures. Je suis axée sur le mythe de l’éternel retour de Nietzsche qui a conçu la 3eme partie d’Ainsi parlait Zarathoustra en grimpant le chemin qui mène au village d’Eze niché sur un rocher. J’ai moi-même parcouru ce chemin laborieux à la montée et à la descente accompagnée et en solitaire.

La solitude, c’est sûr incite à la méditation. J’ai de la chance, qu’il pleuve ou qu’il y ait du soleil ou de la brume, le paysage est toujours fantastique. Certes, le village d’Eze est devenu un village fantôme depuis le décret du confinement. J’ai l’impression de parcourir un village de la belle au bois dormant et que les vieilles pierres chuchotent à mon passage. J’ai la même sensation que lorsque enfant je visitais un cimetière à la Toussaint avec mes parents, j’avais toujours peur en frôlant les tombes de réveiller les morts. Une fois j’ai rêvé qu’un cimetière s’était transformé en village et que les morts avaient entrepris de se rejoindre en se tendant les mains de façon désespérée. Lorsque deux morts réussissaient à s’atteindre, je crois qu’ils se réveillaient enfin. Le village d’Eze se repose, il fait une cure de sommeil, j’envie son calme, sa tranquillité. J’aime enfoncer mes mains contre les pierres. Je les sens plus sensibles que les gens. Au moins les pierres ne me soupçonnent pas d’avoir le coronavirus.
L’esprit de suspicion qui règne est plutôt malsain. C’est tout de même pénible tous ces sourires contraints, ces visages fuyants.

Moi pas connaitre large sourire ! Il ne me reste plus que rire aux éclats de façon indécente en solitaire. Un voisin dans une résidence en bas du village entend secouer les puces de tout le voisinage tous les jours avant 20 heures avec de la musique qui souffle violemment à travers des baffles installés sur son balcon revêtu d’une banderole de soutien aux soignants. Suivant ses humeurs, nous avons droit à la Marseillaise, à l’hymne Italien mais toujours au brouhaha de la salse du démon, des chansons de la compagnie créole et bien d’autres airs qui s’engouffrent dans la cuisine tandis que je fais mijoter de la ratatouille. C’est gai et c’est bienvenu ! Un chat passe pépère sur le balcon plusieurs fois par jour pour rythmer les différents moments de la journée et chaque fois mon ami qui s’agite sur son fauteuil roulant s’exclame « Ah le chat ! ».

Fin du concert « Bonne nuit les voisins, à demain si vous le voulez bien ! »

Eze, le 4 Avril 2020
Evelyne Trân


03/04/2020 ATTENTION : 2 chroniques

1ère chronique :
vendredi 3 avril et la nuit qui suivit : chronique de confinement (pas rigolo du tout)
Voilà une semaine, au moment à peu près où j’écris ces lignes, que j’appris que mon père rentrait à l’hôpital. COVID, pas COVID ? La question fut en suspens quelques heures. Je connais son régime de vie et même s’il a le SARS COV 2, je doute que ce soit la vraie raison. Verdict 2 jours plus tard, pas malade du COVID mais cancer des poumons. Une réponse semble se dessiner sur cette question, comment font les personnes dont un proche est hospitalisé dans les conditions de confinement actuel ? Quelques jours passent. Bien/pas bien, son état fluctue au rythme de la météo. Mon téléphone sonne avec insistance le 1 Avril (une blague !? Non pas du tout), soit une semaine après le début de ce récit. Fausse manip. Étant sur vibreur, je ne l’ai pas entendu et de manière générale, n’étant pas un accro de cet objet, je ne m’en suis rendu compte qu’en début de matinée le lendemain. Alors, tout s’accélère. Son état s’aggrave et le médecin essaye de voir comment autoriser 6 personnes (ses enfants) à lui rendre une dernière visite. Confinement oblige, pas tous en même temps mais répartis sur 2 jours et demi. Bon, il faut s’organiser ! Reste peu de temps. Et bien non, finalement il en reste encore moins. Après son retour de chimio, il n’a vraiment pas bonne mine et comme s’il restait encore un peu de place à l’angoisse pour se développer, il faut le voir au plus vite car rien ne peut présager de la suite. Plus le temps de s’organiser, 2/3 affaires, une attestation pré-imprimée au motif de « fais pas chier, mon père est en train de mourir ». Je prends la route.

Quelle aventure ! 4 Heures de route, presque comme un intrus sur le bitume tellement les autres usagers étaient d’un autre calibre qu’une petite 206. Il fait beau et chaud. Ce qui est une bonne nouvelle d’habitude. Ou, pour les personnes comme moi ( un peu Stoïcien ), Ouep ! Je ne prêtais pas plus attention au temps, ou en tout cas, celui ci n’a pas d’influence sur moi. Je suis quand même dans un endroit humide aux alentours de Grenoble, mais cela fait un moment qu’il ne pleut pas. Il y a un truc non ?

À quoi peut bien penser un gars, en plein confinement, qui prend sa voiture pour voir une dernière fois son père malade d’un cancer des poumons à cause de sa consommation de cigarettes ? Ben, à s’arrêter en rouler une, tiens…

Du bleu dans le ciel, mais pas un ou très peu sur la route. Pas un seul checkpoint (point de contrôle). Tant mieux, tant pis, mais que fait la police… ? Tant mieux car je ne risque rien. Et oui, on prend des risques aujourd’hui face à la police/gendarmerie. Tant pis, car une petite explosion est en suspens et cherche à tout prix une raison de sortir. Mais, que fait la police ? Soit l’État nous trouve très raisonnables et n’estime pas nécessaire (rentable ?) de mobiliser les forces de l’ordre pour faire respecter le confinement. Soit il n’y en a presque plus tellement ils ont été remplacés par les radars. Auquel cas, la protection des citoyens …

Enfin j’arrive. De l’appréhension due à nos relations familiales, pas compliquées mais pratiquement inexistantes. Il va mieux. Avec l’assistance respiratoire, l’oxygène circule mieux et il reprend des couleurs. On va pas trop s’enthousiasmer, mais quand même un peu.

Là, on ne joue plus avec les mêmes règles, ou plutôt je me rends compte que les règles sont différentes. Pendant que nous comptons 1h, 2h, 3h, 4h, … L’autre compte à l’envers connaissant déjà la chute et n’ayant comme seul surprise que notre réaction a la fin du décompte. Suite à mon arrivé le Jeudi 2 Avril vers 18h30 il ne restait donc plus que 30h environs. On ne savait pas à ce moment-là et bien sûr on parlait d’une possible organisation s’il finissait par sortir. Une autre sortie, plus coûteuse pour nous était organisée et on l’apprit la nuit du samedi 4 avril à 2h30.
S’organiser, encore et toujours. Pour la première fois confronté à cela, et en cette période comment ça doit se passer ? Doit-on aller à l’hôpital de suite ? Je finis par les avoir.

[Courage à vous tous, infirmières, caissières, éboueurs, agriculteurs, paysans, ... Tous ceux qu’on oublie tellement ils sont indispensables et qui travaillent, et peut-être même contre leur volonté. "Tiens une prime que tu vas toucher pour les risques que tu as pris, mais surtout ne te limite pas, prend des risques à fond car nous ne sommes pas préparés à faire face à un manque d’alimentation ou à tout autre service. En gros, nous sommes incapables de subvenir à nos besoins".]

Infirmière au téléphone :
-Blablabli, blablablou, je ne devrais pas vous le dire mais nous avons regardé les radios de votre père et vous devriez vous faire dépistés car en plus du cancer, ça ressemble pas mal au COVID…
-AAAAAaaaaaaaAAaaaAAAaaaaAaaHhHHHHHhH !!!
Putain de merde, vous nous dites maintenant, après nous avoir affirmé que cela ne l’été pas. Que mes frères et sœurs, qui ont revu leurs enfants, conjoints, famille entre-temps. Mon père avait peut être aussi le SARS COV 2 ?
- Oui le dépistage n’est fiable qu’a 59 %
- Non….

Alors voilà, c’est là où j’en suis ce matin. Je me demande à quel point nous savons ou nous ne savons pas les choses . Il est certainement impossible d’admettre pour l’État qu’il ne sait rien et que plus rien ne pourra être comme avant car nous ne reviendrons peut-être jamais, ou en tout cas pas avant quelques années, à l’état d’avant. Je vous mets en garde aussi car j’ai sûrement tendance à dramatiser en l’état.
Fabien V.

2e chronique :
La vie d’arrache-pied : depuis quelques jours, j’ai le sentiment de vivre le film Un jour sans fin, avec comme seule différence que je ne mets plus mon réveil à sonner le matin comme je le faisais auparavant. De toute façon, que l’on soit dimanche ou lundi, je me réveille à la même heure mais m’autorise à présent à traîner un peu plus longtemps au lit. Au bout d’un moment, après m’être tourné et retourné plusieurs fois, je me redresse brusquement et m’assois sur le bord du lit pour fixer ma montre à mon poignet. J’ai alors le sentiment de revivre la même chose que la veille, en constatant que de jour en jour je suis légèrement plus abattu .
Un matin, j’ai descendu mes sacs poubelle papiers, emballages plastique et métal, et sac destiné au compost dans le local situé au deuxième sous-sol de l’immeuble. L’ascenseur s’est arrêté au rez-de-chaussée, le gardien et un homme de ménage avec masque de protection sont alors entrés précipitamment en m’expliquant que quelqu’un, porteur du Covid-19, venait de prendre l’ascenseur. Tandis que nous continuions de descendre, les deux hommes se mirent à nettoyer consciencieusement les boutons d’ascenseur ainsi que la barre d’appui latérale et les parois avec une solution qu’ils vaporisaient. Je suis sorti de là quelque peu désemparé, ne sachant ce que je devais faire. Qu’avais-je donc pu toucher en pénétrant dans l’ascenseur ? Je ne voyais pas, à part le bouton d’étage. Revenu chez moi, je me lavai les mains plus scrupuleusement que d’habitude avec le gel hydroalcoolique que je laisse près de l’évier dans la cuisine.
Puis, en m’efforçant de ne plus penser à cet épisode, je repris ma lecture, assis dans le fauteuil du bureau : il y a près de trois semaines (la veille du confinement, autrement dit une éternité ‒ un jour d’avant), Louis, un ami poète m’avait donné deux sacs de livres, m’assurant qu’il n’avait plus de place chez lui et malgré que de mon côté je ne dois guère en avoir plus, j’avais cependant accepté ses livres. Pour la plupart, il s’agit de poésie, d’auteurs que je connais et apprécie, mais il y en a pourtant d’autres que je ne suis pas sûr de lire (qu’il ne m’en veuille pas), comme ceux de Pierre Guyotat mort il n’y a pas deux mois. Mais un auteur m’a attiré, Robert Antelme et son livre L’espèce humaine  (1947 ‒ il était alors l’époux de Marguerite Duras). Il s’agit du récit de son enfermement pendant la seconde guerre mondiale au sein du kommando (unité de travail forcé) de Gandersheim, lequel est encadré par des détenus allemands de droit commun (assassins, voleurs, escrocs, sadiques, trafiquants), après qu’il ait été extrait du camp de concentration de Buchenwald.
J’avais lu quelques années auparavant deux livres traitant de la Shoah, À pas aveugles de par le monde , de Leïb Rochman, et Les disparus, de Daniel Mendelsohn. Les deux décrivent ce qu’on imagine guère possible de décrire, la précision nous montrant l’horreur, mais surtout l’incompréhensible cheminement conduisant à la négation des êtres humains. Je ne sais ce qui m’a poussé à ouvrir le livre de Robert Antelme, mais les premières pages m’ont fasciné et m’ont forcé à continuer sa lecture : « Ce n’est pas parce que les SS ont décidé que nous n’étions pas des hommes que les arbres se sont desséchés et qu’ils sont morts », écrit-il. Au fil des pages il détaille la vie misérable de ces hommes confinés dans ce qu’il leur reste d’humanité, un lien ténu qui s’amenuise petit à petit, au gré de la sous-alimentation (soupe, patates et épluchures volées) qui leur est imposée, à la violence quotidienne, la peur du kapo, la solitude, l’humiliation, le meurtre comme exemple. La terreur hante tous les esprits, c’est elle qui habite leur maigreur, qui remplit leurs ventres du matin au soir et même la nuit, et pourtant, pourtant ils imaginent, ils rêvent, ils attendent. En somme, leur humaine condition les relie les uns aux autres en tant que membres de la même espèce.
En même temps que j’avance dans le livre, je découvre la fragilité de notre situation actuelle, où un simple virus pourrait tout emporter. Nous savons que le pire est toujours à venir, mais sachant cela, c’est ce qui fait notre force, celle qui nous pousse à toujours rebondir, à aller de l’avant. Avant la libération des camps, en ce mois d’avril 1944, Robert Antelme, comme les 400 autres prisonniers, est forcé d’avancer sur la route où à la confusion se mêle un avenir incertain vers un autre camp possible. Il sait qu’il peut, et va peut-être mourir, mais il marche tant bien que mal, parce que vivre est ce qui compte et qu’il faut le montrer. C’est sans doute ce qui nous caractérise, nous autres humains. Nous ne connaissons pas cette injonction et n’avons pas idée de l’extrémité à laquelle sont livrés ces prisonniers en marche. Certains vont être froidement abattus, par petits lots, d’autres vont mourir de faim ou d’épuisement et d’autres enfin vont survivre.
Le président nous a dit que nous étions en guerre contre un ennemi invisible : « Dans cette guerre, nous devons être un bloc, et être unis ». Un ennemi à qui l’on a donné le nom de Covid-19. Pourquoi pas ? ça aurait pu être LBD 40, quelle différence, un mot (des maux) chasse l’autre, il y a toujours une explication et quelques lettres et des chiffres suffisent. Qu’est-il prêt à risquer pour que les affaires continuent et le marché d’exister, contre les licenciements et les dépôts de bilan ? Le monde d’après sera-t-il le même ? Nous connaissons aujourd’hui le paradoxe de la libération de la parole (des femmes) et du confinement sanitaire (de tous et toutes).
Pour l’heure, pas de doute, nous sommes bien au printemps. De ma fenêtre, au 8e étage, j’aperçois les fleurs blanches des arbres et d’autres, plus loin, avec de toutes petites feuilles vertes qui tentent d’apparaître, alimentées par le chant des oiseaux perceptible sans le bruit des autos. En début d’après-midi, une voiture militaire est venue se ranger dans le passage qui conduit au groupe d’immeubles situés un peu plus loin ; un soldat est sorti une arme automatique à la main, il s’est adossé au mur du petit immeuble en briques, à la limite de l’ombre et du soleil, puis il est resté figé un moment à observer à droite, à gauche. Personne ne passait à ce moment-là. Au bout de quelques minutes, il est revenu à la voiture, a enlevé son béret, rangé son arme, s’est assit à l’arrière. La voiture a démarré lentement, a rejoint la rue puis elle a disparu.
Il me vient à l’esprit que je vais devoir encore descendre une poubelle. C’est fou ce qu’on peut jeter.
Alain Eludut
Groupe Pierre Besnard

02/04/2020
( ces quelques pensées écrites en vrac , un bref résumé de mon état d’esprit des jours passés, rédigé sur des chansons d’Hubert Félix Thiefaine et de Michel Pettruciani , avec une mention spéciale pour son morceau Home que j’adore)

Confinement : selon le dictionnaire Larousse en ligne, son synonyme est réclusion..me vient alors à l’esprit les mots « réclusion criminelle à perpétuité »...les mots se bousculent dans ma tête.

Chaque matin en ouvrant les yeux la réalité reprends brutalement toute sa consistance..je sors de ma nuit et je me dit « coronavirus, confinement... » comme un mauvais film de science fiction, un truc qui arrive, que je comprends mais que mon cerveau n’intègre pas complètement..parce que c’est trop fou, trop ingérable, trop imprévisible...et que ça bouscule mon besoin de certitude et de maîtrise.

Confinés, reclus ..dans un espace de 50 m² ,au cœur d’un tout petit village du Haut Diois, niché à 1000m d’altitude ...une trentaine d’habitantes-ts...en majeur partie des personnes de plus de 75 ans.
Il y a pire comme conditions de réclusion..heu pardon de confinement.
Mais pour nous, peu de changement, si ce n’est qu’il n’y a plus de bises quand on se croise dans les rues du village, que le gens se tiennent à distance et restent chez eux..
Parce qu’elles sont vieilles, parce qu’ils sont vieux, et qu’on leur a bien dit aux infos à la télé que le Corona était un virus qui terrassait principalement les personnes âgées...et puis ici..pour se faire soigner, pour aller aux urgences et accéder à des services de soins intensifs c’est un peu compliqué..

Nous sommes rentrés d’un voyage à vélo de 8 semaines en Thaïlande à la mi janvier..nous avons goûté à la liberté de se déplacer, de dormir, de manger, de boire quand nous le voulions, où ne le voulions..nous avons parcourus 2800 km de liberté absolue pour nous retrouver aujourd’hui reclus , enfermés, prisonniers, cloîtrés, menacés par un truc invisible et sournois qui s’attaque au monde...un virus qui fait peur, un virus qui ébranle nos moindres certitudes et nous renvoie inévitablement à notre condition de mortel ..la situation peut aussi prêter à rire..à rire à gorge déployée de notre arrogance à vouloir toujours tout maîtriser, contrôler, dominer, bafouer, détruire, saccager….notre totale inexpérience de la vie..

Nous voilà mis à nu, nous voilà dépouillés de notre confort, de notre train train, de notre cocon familial amical, professionnel..nous voilà nous questionnant sur l’avenir, nous voilà nous cognant aux murs sans savoir de quelle manière rebondir..nous voilà face à nos joies, nos colères, nos chagrins; face aux enfants qui courent partout dans tous les sens et nous étourdissent, face à l’absence des enfants qui sont ailleurs, loin, et qu’on aimerait pouvoir tenir contre nous, qu’on aimerait embrasser, qu’on aimerait protéger….

Alors nous « profitons » de ce temps suspendu pour lire les bouquins que nous avions mis de coté en attendant « d’avoir le temps pour »...nous couchons nos espoirs, nos émotions sur papier ou sur notre ordi, nous cuisinons, nous redécouvrons le plaisir de nous téléphoner ;prendre des nouvelles des amies-s, des parents..savoir si tout le monde va bien, mais au final c’est toujours la même discussion qui tourne en boucle…

Les journées s’étirent « d’une langueur monotone » ...
Ce temps suspendu nous permet aussi de le voir venir ce jour nouveau..oui ce jour où les colères qui auront grondé en silence confiné viendront enfin s’épanouir …
J’attends, en suspens, j’attends, et j’espère, qu’enfin« les sanglots longs » n’auront pas été versés en vain…
Parce que si demain, nous laissons passer les choses, si demain nous ne sommes pas toutes et tous ensemble à battre le pavé, à faire tomber des têtes, alors je me dis que plus rien ne nous fera jamais agir et réagir..qu’ils auront gagné, définitivement devant notre inertie à les laisser nous tuer en toute impunité.

Une pensée particulière pour toutes ces personnes réellement confinées dans les prisons, les hôpitaux psy..toutes ces personnes que nous oublions dans un silence assourdissant.

Nath (la rue râle)



01/04/2020 ATTENTION, 2 CHRONIQUES


1ère chronique
Ma chronique attendra. Je suis en train de me battre pour pouvoir continuer à exercer mon boulot de boulanger
considéré comme essentiel mais pas quand tu vends sur les marchés qui sont réservés aux agriculteurs, pas aux artisans...
Guillaume. Groupe Le Ferment

2e chronique
Confinement ad vitam æternam ?

Le confinement continue avec bien sûr ses inconvénients, notamment l’impossibilité de rencontrer physiquement ami-e-s et camarades. Par contre il y a aussi des aspects positifs (enfin, pour moi). Je ne vous parlerai pas de la pollution en chute libre à Paris due en grande partie semble-t-il, au fait que les bagnoles ne circulent pratiquement plus (elles aussi sont confinées). Mais ça m’a permis de réorganiser mon emploi du temps ; depuis plus de deux semaines mes journées commencent par un jogging ; ce matin, départ à 6h30 ; il fait encore nuit et le Parc des Buttes-Chaumont est fermé, pas grave, le quartier est désert, personne dehors à part moi, et surtout, surtout, aucune voiture : le luxe. Je peux sillonner les petites rues en remontant jusqu’à la Place des Fêtes, puis redescendre la rue de Belleville en courant non pas sur les trottoirs, mais au milieu de la chaussée (pas de risque de me faire écraser) ; le luxe vous dis-je.

Autre avantage, le silence qui s’est installé et qui permet enfin d’entendre les oiseaux et surtout les mouettes (si, si, il y a des mouettes, même s’il n’y a pas la mer). Ne manque que l’arrivée prochaine des martinets dans le ciel parisien et mon bonheur sera complet.

Nouvelle habitude due au confinement : un lointain voisin (à 300 mètres) s’est improvisé DJ avec une sono d’enfer. Deux fois par jour, vers 13h et 19h45, il balance la musique à fond avec une préférence marquée pour les Beatles (c’est évidemment pas pour me déplaire). Puis il s’adresse à tous les habitants de la rue pour de vibrants appels à la solidarité, à l’entraide … mais là, ça se gâte un peu ; au fil des jours il est passé du soutien aux personnels soignants, puis à l’hommage aux pompiers (aïe, aïe, je voyais venir le coup suivant), et enfin hier soir il a demandé d’applaudir « les militaires et policiers qui nous protègent ». Là, trop c’était trop, on a sifflé et hué, mais faut reconnaître qu’on était vraiment minoritaires. Voir applaudir cette police qui, il y a peu, gazait et tabassait les manifs du personnel soignant demandant plus de moyens pour le secteur hospitalier, ça me reste en travers du gosier. Où étaient donc, les mois précédents, tous ces gens qui applaudissent tous les soirs à 20h ; dans les manifs ? J’ai de gros doutes. Vont-ils enfin comprendre que la situation lamentable de nos services publics n’est pas due au hasard mais à une volonté délibérée de nos divers gouvernements de ces quinze dernières années. La santé ? Pour eux, une marchandise comme une autre.

En milieu de journée j’allume ma TV histoire de glaner quelques infos pratiques ; il semble que l’on se dirige de prolongation en prolongation du confinement jusqu’à fin avril, et probablement vers la mi-mai.
Heureusement un camarade bien informé m’a téléphoné pour me rassurer. Il m’a signalé la dernière déclaration de Sibeth Ndiaye porte-parole du gouvernement . Elle est catégorique: « Si d’aventure le confinement était prolongé jusqu’en juin, dans ce cas il serait suspendu pendant le week-end de la Pentecôte afin de permettre la tenue du congrès de la Fédération anarchiste ».
Quoi, le 1er avril ? Quel poisson ?
Ah ben zut, j’y ai cru moi.
Ramón Pino. Groupe anarchiste Salvador-Seguí

31/03/2020
Frais, frais, frais le poisson ! [note]
Je viens de rentrer en France, avec mon compagnon, d’un long voyage far away, jusqu’à une île du bout du monde : la Tasmanie. 40 jours et 6200 km en camping-car, sans fil à la patte (ni téléphone ni internet), à croiser sur notre route kangourous, wallabys, wombats et échidnés, à dormir dans la forêt primaire parmi les fougères géantes, à marcher jusqu’aux falaises du Pacifique, à se balader sur les rives des lacs (Kalangadoo for ever), à parcourir pieds nus les mille et une plages immaculées de l’Océan Indien à la recherche d’oiseaux endémiques, à voir les manchots venir nourrir leur progéniture dans les rochers, à suivre le cours des rivières à l’aube pour débusquer les ornithorynques, à traverser les petites villes perdues les plus improbables au milieu de nulle part, à respirer un air propre à l’essence de huon pine, à contempler la voie lactée la nuit et le jour un ciel sans une trace d’avion. 40 jours ailleurs, 40 jours de liberté. Et, last but not least, nous avons pu explorer la rainforest du south west, : Melaleuca, là où les pistes n’arrivent plus, Et puis, étant passés par Singapour à l’aller, nous sommes revenus par Santiago, afin de réaliser notre rêve de faire le tour de la planète et dans la perspective exaltante de participer à la Grève générale féministe des 8 et 9 mars dans un Chili en pleine révolte sociale et politique. Changement de langue et de décor sur fond de décalage horaire, plongée dans la lutte politique : nous n’avons pas touché terre.

Arrivés chez nous, inévitablement, nous avons été quelque temps au régime marmottes le jour et zombies la nuit. Même pas encore fait les courses. Aujourd’hui seulement, j’ai enfin allumé la radio pour avoir quelques infos, pour la première fois depuis si longtemps. Après ce serait super de faire un tour en moto. Comment ça, on est tous « confinés par ordre du gouvernement » ? Ça veut dire quoi « il n’y a plus de masques ? « Les morts se comptent par milliers... Un couvre-feu contre le coronavirus est envisagé... ». Et ce serait pareil sur toute la planète ? Mais pas du tout ! Nous on revient du Chili, le couvre-feu de Piñera, c’était pour réprimer la révolte et on mettait des masques, certes, mais à cause des gaz lacrymo... C’est quoi ce cauchemar ?

Attendez, parce que nous, on est encore à l’heure de la Tasmanie... Nous sommes vraiment le 31 mars ou déjà le 1 avril ? Ok, bien joué, j’ai failli marcher. C’était quand même un peu trop gros pour être vrai, faut faire dans le vraisemblable quand on veut être crédible : je suis convaincue que la Chine est une dictature féroce dont le niveau de pollution est malheureusement inversement proportionnel au niveau d’hygiène, et je suis absolument partante pour dénoncer la maltraitance des animaux propres à la consommation ainsi que la perte de diversité de la faune sauvage. Avec tous ces produits polluants qui causent la disparition des insectes, il y a de moins en moins oiseaux, la fin des petits mammifères signe celle des rapaces etc. Le capitalisme c’est la mort et tout ça va très mal finir. La catastrophe n’est même pas imminente, elle est en cours. Mais ils ne me feront pas croire que c’est l’apocalypse, now comme par hasard. Poisson d’avril pourri !

Parce que dans le pire des scénarios imaginables, aucun gouvernement de notre cher « pays des libertés » ne pourrait se permettre de nous assigner à résidence et de nous obliger à collaborer à notre propre flicage en présentant un formulaire avec nom, adresse, où on va, pourquoi on y va, qui on va rencontrer, à payer une amende voire à être condamné à la taule en cas de déplacement non autorisé par décret. Aucun gouvernement de la « patrie des droits humains » ne pourrait se permettre de publier des catégories de population à sauver (les jeunes, les biens portants) ou à laisser mourir (les vieux, les malades, les handicapés, et qui sait qui d’autre encore, les « morts acceptables » selon leur point de vue inacceptable !). Non, aucun ne pourrait se le permettre sans déclencher immédiatement la révolution.

En revanche, j’apprends que la reine d’Angleterre est morte du coronavirus et qu’il n’y aura pas de cérémonie de funérailles. Et ça, ce n’est pas un poisson d’avril !
Monica Jornet
Groupe Gaston Couté FA

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PAR : Pierre Sommermeyer and CO
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