Voir Copenhague et mourir…

mis en ligne le 14 janvier 2010
Tout le monde en ce moment, de l’ouvrier métallo d’un chantier sud-coréen au collégien slovène, du sous-officier tanzanien à la marchande de quatre-saisons guatémaltèque, tous se posent cette question : mais bon dieu où se trouve donc Copenhague ? Eh bien, pour ceux qui n’ont pas eu la chance d’aller à l’école, les cancres qui lisaient Le Monde libertaire pendant les cours de géographie et les ermites qui auraient loupé l’effervescence médiatique actuelle, Copenhague est la capitale d’un charmant petit pays d’Europe du nord, appelé Danemark, dans lequel il fait bon vivre, nous disent tous les indicateurs mondiaux. Mais méditons un peu sur cette fameuse conférence.
D’où viens-je ? De multiples tergiversations et anciennes réunions internationales où l’on mange beaucoup de petits fours et pinaille sur des points de détails et des graphiques pleins de couleurs entre scientifiques, industriels, groupes de pression et chefs d’État, en prévoyant la conférence suivante puisque rien ne sortira de celle-ci. Les touristes ont déjà visité Rio de Janeiro (1992), Bonn (2001), Johannesbourg (2002) et Bali (2007) et en ont ramené beaucoup de promesses et de cartes postales.
Qui suis-je ? Je suis une conférence où se joue, paraît-il, le sort du monde climatique, la survie de l’ours blanc, la destinée des premiers réfugiés climatiques et la pérennité du dioxyde de soufre sans lequel il ne saurait y avoir de civilisation. Eh oui, rien que ça !
Où vais-je ? Nulle part ! C’est-à-dire pas plus loin qu’auparavant. Et c’est là tout le problème.
En effet, on retrouve grosso modo les mêmes qu’auparavant, bien que quelques têtes dirigeantes aient changé suite à des élections (ce sont les aléas de la démocratie). Ces hommes de bon sens, et bien d’autres encore, se sont donné rendez-vous pour écrire l’histoire et sauver la planète en décidant de réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre. Bref, tout cela est si loin de la réalité, si déconnecté du réel, que nous pouvons d’ores et déjà jouer les Cassandre et prédire que rien ne jaillira du Jutland.
Car ce sont ceux-là qui s’appuient sur les mécanismes du marché pour résoudre le problème écologique, avec les bourses du carbone et le marché du droit de polluer ; les mêmes qui parlent de quotas d’émission, parient sur la voiture électrique ou rabâchent cette farce du « développement durable » alors que nous vivons une extinction massive d’espèces animales et végétales.
L’urgence environnementale est telle que seules les solutions radicales que nous prônons pourraient sauver ce qui peut encore l’être : décroissance, redistribution des richesses et partage solidaire avec les peuples les plus pauvres, fin du capitalisme, de l’exploitation de l’homme par l’homme, du productivisme et d’un horizon humain limité à la consommation et aux indices boursiers, souci d’assurer d’abord à TOUS la nourriture, l’habitat, l’insertion dans la société et l’accès à la culture, l’émancipation enfin.
Gageons qu’il ne sortira pas de cette kermesse aux harengs une révolution et que chacun, l’esprit apaisé par le devoir accompli, repartira… en avion, bien sûr.

Madame de Pompadour