Des images fortes

mis en ligne le 28 janvier 2010
Pour quiconque fréquente le milieu libertaire et punk parisien, Yann fait partie de ces figures incontournables. Sympathique et discret, il arpente manifestations et concerts depuis des années, appareil au poing. Ses photographies ont souvent été utilisées pour des affiches, tracts, fanzines, affiches… Car Yann est un travailleur de l’ombre. Comme tant d’autres, il oeuvre pour faire avancer des idées et des pratiques. Sans se mettre en avant. Mais pour mettre en valeur. Pour lutter. Pour montrer. Car ce que Yann nous montre, c’est à la fois notre monde, nos microcosmes, à nous militants libertaires ou activistes musicaux (celui des luttes, des concerts, des graffeurs, des tatouages et des décibels…), et celui qui, sans nous être quotidien, fait partie de nos préoccupations, de nos solidarités : l’Irlande du Nord, la Palestine, etc. Des images fortes, pas par goût d’un sensationnalisme exacerbé ou d’un voyeurisme déplacé. Des images fortes parce que la réalité est parfois dure ou joyeuse, et que le travail d’un bon photographe consiste justement à en saisir l’essence même. Parce que nos vies sont faites de ces joies, de ces difficultés qui font que rien n’est lisse, que rien n’est linéaire et prévu d’avance. Le cheminement dans ce beau livre en est le reflet. La cohérence ne s’y trouve pas dans des classifications arbitraires, sujets par sujets, thèmes par thèmes. On le feuillette, on y flâne. En noir et blanc ou en couleurs, les photos frappent nos rétines, à l’image des clichés consacrés aux sports de combats dont Yann est grand amateur et auxquels il consacre une partie de son ouvrage. Certaines doubles pages ne permettent pas toujours d’apprécier à leur juste valeur chaque photographie, mais l’ensemble est une belle réussite. Marge(s) est le premier recueil de Yann. Un long accouchement, rempli de doutes, d’interrogations, de questionnements, mais toujours plein de sincérité. Le résultat valait que l’on s’y attarde.