Nouvelles des fronts

mis en ligne le 17 mai 2010
Un grand premier mai unitaire et à moitié foiré et hop plus de souci pour les pensions, le gouvernement battrait en retraite pour si peu, on se moque de qui ? Espagne, Italie, Portugal, Grèce…, les uns après les autres les pays européens tombent sous le joug du « réalisme démographique » et des restructurations, et aucune manif, fût-elle de masse, n’a fait jusqu’alors reculer un gouvernement…
Alors Thibault et consorts, une fois de plus, nous ont pris pour des billes et le projet de loi sur les retraites sera voté comme il se doit avant les congés d’été afin d’éteindre sous les crèmes solaires la colère populaire. Aucune manif, alors que faire ? Toujours la même vieille recette, prendre l’argent où il est, dans les caisses du patronat où s’entasse la plus-value réalisée sur le travail. Il est paradoxal de voir un pays plus riche qu’à la Libération pratiquer des coupes sombres sur les acquis des maquis. Alors, et cela au niveau européen, nécessite d’autres outils que la manif parisienne, marseillaise, bruxelloise ou athénienne. Comme cela commence à se faire ici ou là, occupation, séquestration, grève générale illimitée avec en prime quelques usines brûlées un soir de colère, comme autrefois les châteaux des aristos.
Une nouvelle classe de hobereaux de la finance et du Cac nous tond chaque jour un peu plus. Aux vieilles misères, les vieilles recettes : « à la lanterne ! »
Et pourtant, ils se battent mais toujours et encore en ordre dispersé et bien souvent avec l’épée du capital dans les reins, pour une prime, pour reculer le temps de la dèche dans des bassins d’emplois sinistrés.
À Sodimatex, à Crépy-en-Valois, l’usine n’a pas sauté et les « négociations » ont permis d’obtenir quelques euros de prime supplémentaires. Mais ailleurs, d’autres usines pourraient devenir les lieux flamboyants de la lutte des classes et d’un postluddisme du désespoir. Que ce soit celle du fabricant de lingerie Lejaby dans le Rhône où 197 salariés seront bientôt à poil comme 147 autres chez Playtex. Ou alors l’usine de prothèses PIP à La-Seyne-sur-Mer (Var) où 120 salariés vont subir une mauvaise greffe ou encore les usines Thomson de Rennes (198 emplois menacés), de Brest ou encore des Yvelines où 129 postes se jouent durant la séquestration de quelques cadres serviles. À moins que ce ne soit celle de PSA à Meulin-Sénart (77), où ce sont 400 emplois qui seront mis au tapis, où de Sanofis-Aventis et ses 1 000 suppressions annoncées où, pour finir, celle du groupe Entremont où 80 emplois menacent de tourner au lait caillé. Les paris sont ouverts car un jour, il est probable que par désespoir, les menaces seront mises à exécution, pour l’exemple ! Défendre l’outil de travail à des limites sauf à le collectiviser et à reprendre la production dans un cadre autogestionnaire !
Et pourtant, avant ce « grand » premier mai déjà oublié, de nombreuses grèves sectorielles ont éclaté. À la SNCF, quatorze jours de grève pour presque rien. On s’étonne ? À moins que ce ne soit pour redorer le blason d’une CGT en perte de vitesse mais alors qu’allait faire SUD-Rail dans cette galère ? À retenir, une DRH aux ordres de Sarko qui ne négocie pas durant le conflit, sans doute un ballon d’essai pour les prochaines grèves dans les services publics… à suivre.
Mais encore grève des marins de la SNCM et de CNM entre la Corse et le Continent, grève du syndicat du Livre à Paris et des personnels de Nice-matin ; grève des tris postaux des Hauts-de-Seine face aux « reclassements » incertains des 400 trieurs dont les postes sont supprimés ; deuxième grève dans les crèches face aux dégradations des conditions d’accueil des enfants et de travail des salariés, et grève au Samu social de Paris où, comme chez Emmaüs il y a quelque temps, charité rime avec précarité. Grève à la Caisse d’épargne d’Ile-de-France contre les cadences infernales et débrayages et grèves tournantes à Airbus pour des embauches et des augmentations de salaire.
Petites victoires juridiques dont on se contentera faute d’action directe chez Myrys où le patron a pris un grand coup de pompe dans le cul, et surtout a été condamné à verser 3,82 millions d’euros aux 277 salariés virés en 2000 (faut pas être pressé !) sans cause réelle et sérieuse et pour inexécution des obligations en matière de reclassement. Trou d’air chez Easy Jet condamné à une amende de 1,4 million d’euros pour avoir employé des salariés en France sous contrat de travail britannique, donc avec moins de cotisations sociales. Toujours ça de gagner aisément… sauf à se faire pincer.
Ailleurs dans le monde, grève exemplaire chez Carlsberg à Copenhague contre la diminution de l’allocation journalière de bière gratuite, grèves sectorielles et générale en Grèce face aux malversations et à la spéculation et au risque d’un recul de l’âge de départ à la retraite de 53 à 67 ans ; augmentation du chômage en Espagne, plus de 4 millions de salariés privés d’emploi.
Et toujours des morts dans les mines. Cette fois en Virginie, où vingt-cinq mineurs ont péri. Mais qu’on se rassure, la Chine de l’exposition universelle conserve le record du monde avec 2 536 morts en 2009. Devenir une grande puissance, ça se paye… Quant à la France, petite puissance, on ne déplore que le suicide du chef de cuisine d’Euro Disney, le troisième chez Mickey en deux mois. La souffrance et les suicides au travail ou à cause du travail ne sont pas des contes de fées, il convient d’en parler aux enfants.