Dany le rouge et noir

mis en ligne le 27 mai 2010
1597CohnBendit« Maurice, dire qu’on était en tête d’un mouvement révolutionnaire c’est faire comme les marxistes… le problème n’est pas d’être anarchiste ou pas mais plutôt révolutionnaire ou contre-révolutionnaire… c’est dans la spontanéité que l’on crée les luttes… » Qui s’adressait ainsi à Maurice Joyeux de la Fédération anarchiste au cours du Congrès international des fédérations anarchistes, du 31 août au 3 septembre 1968 ? 1 Tout simplement Daniel Cohn-Bendit, le député européen donneur de leçons émérite en stratégies politiques de changement social. C’est pourquoi on s’étonnera de trouver dans l’article qui lui est consacré dans la dernière livraison des dossiers du Canard enchaîné, « Les profiteurs du bizness écolo », la phrase suivante : « Il n’est dans aucun groupuscule, dans aucun clan, mais se fait d’emblée remarquer par sa faconde et son énergie. » D’accord, sans réserve, pour la seconde partie, mais pour la première… Celles et ceux qui militaient autour de 1968 savent bien qu’il était au groupe Noir et Rouge pour ensuite, à Nanterre, être un des leaders du mouvement du 22 mars 2.
Alors, méconnaissance de l’époque de la part d’un jeune journaliste ou volonté de gommer, suggérée peut-être par l’intéressé lui-même ? Va savoir !


1. C’était à Carrare, en Italie, dans le double disque vinyl (Archivi sonori, Istituto Ernesto de Martino). On peut écouter les enregistrements avec en vedette les échanges « vigoureux » entre Daniel Cohn-Bendit et Maurice Joyeux pendant le meeting public. Le pas encore député européen représentait (avec d’autres dont on oublié le nom…) le mouvement du 22 mars venu à ce congrès en observateur.
2. Pour les sceptiques ! Dans la préface du livre de Jean-Pierre Duteuil (Nanterre 1965-66-67-68. Vers le mouvement du 22 mars, Éditions Acratie, 1998), écrite par Daniel Cohn-Bendit, on peut lire : « Jean-Pierre Duteuil et moi, nous avons non seulement milité ensemble, mais vécu, en marge du monde politique officiel, dès 1966, le même rêve de la révolution libertaire, antitotalitaire, anticommuniste et anticapitaliste. Ce n’est pas divulguer un grand secret que d’avouer qu’aujourd’hui nos itinéraires ont bifurqué dans des directions on ne peut plus différentes. Alors qu’il est resté, lui, un “accro” du mouvement libertaire, et actuellement à la cause basque, moi je me retrouve à me débattre dans les filets d’un réformisme écologique, lui aussi souvent un peu réducteur et simpliste. Enfin, passons. »