Imaginaire mécanique

mis en ligne le 20 juin 2010
Un recueil de poésie qui se réclame de l’anarchie et qui sait le dire n’est pas fréquent. La sûreté de composition de l’ensemble donne à penser qu’ici le hasard lui-même a partie lié avec une volonté de radiographier la réalité dans ses recoins les plus obscurs. En outre, il y a quelque chose de musical, non pas dans la banale acceptation d’une musicalité de la langue, mais par une manière de composition qui rejoint l’esprit de la variation. Trois mouvements : cependant… et… alors… où se trouvent variés, sur la base d’une structure fixe, quelques motifs qui traversent tout le livre. Il n’existe pas a priori de poètes qui aient mis en œuvre une telle mécanique imaginaire. Le vaste mouvement central est frappant par la façon dont chaque vers d’un dizain conserve son autonomie, à tel point que l’ensemble du poème qui les juxtapose est chargé de tout l’imprévisible que pourrait offrir à l’échelle d’une phrase, la lecture d’un « cadavre exquis ». C’est peut-être grâce à cette conjonction rare d’artisanat patient et d’intuition toujours effervescent – sans oublier la part d’humour – que ce livre doit sa force d’expression singulière, entretenue tout au long avec bonheur ! Et comme il se doit :
« Alors les voix seront anarchistes
une flamme sur l’herbe posée
le monde ignorant tombera du wagon
les enfants et les peuples mangeront
je bêcherai les peaux jusqu’au soir
sur les plateaux aux phares agonisants
un rêve se formera dans les yeux. »
À noter aussi ses derniers recueils : Abeille(s) aux éditons des Vanneaux, Pour retendre l’arc de l’univers, Éditions Gros Textes, etc.

Romuald Lamboley