Lapin, Mouche et Wonderwoman

mis en ligne le 10 février 2011
Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? En Chine débute l’année du lapin. Information de prime abord tout à fait dénuée d’intérêt, de second abord idemement, nous sommes bien d’accord. C’est juste que ça fait du bien de parler de lapin, ça nous change des carpes. « Quand je suis allée en Tunisie il ne se passait rien », se défendait ainsi Mam, carpe en représentation l’autre soir sur les plateaux téloches, après que furent révélés ses vacances là-bas, aux alentours du jour de l’an. Elle faisait alors face au clébard Pujadas, homme-tronc dont il se dit qu’il a les mains rugueuses mais la langue bien humide. « Quand je suis ministre je suis ministre, quand je suis en vacances, je suis comme tous les Français », ajoutait la dame baladée, en pleine insurrection, dans un jet privé appartenant à un des voleurs de la clique de Ben Ali Baba. Tous les Français feraient ainsi lors de leur séjour à Djerba ? Tous les Français n’ont, en tout cas, guère la possibilité de squatter les écrans télé telle la ministre ce soir-là, quittant Canal + à 19 h 55 pour être en direct sur F2 à 20 heures précises. Les studios des deux chaînes étant loin d’être mitoyens, le doute n’est plus possible : mouche à merde, c’est Wonderwoman. Une Wonderwoman agacée : « écoutez, j’ai juste pris cinq jours de vacances, et franchement je les méritais ». On n’en doute pas, Mouche. « J’ai pas pensé à mal », qu’elle dit, et « je suis meurtrie, vraiment meurtrie ! » Pauvre mouche, pauvre Mam, qui, toute meurtrie qu’elle fut, n’en conclura pas moins sa toute martiale intervention par un « Je ne démissionnerai pas », qui vaut son pesant de culot et son poids de foutage de gueule. « Je ne démissionnerai pas », disait aussi Woerth en son temps. Depuis, il s’est fait gravement lourdé. À méditer, Mouche, n’est-ce pas… Car même si, selon Baroin, porte-parole du Sarkozystan, « l’affaire est close » désormais (pour qui il se prend ce morveux, pour un proviseur de base ?), tout porte à croire qu’à la première occase Mam sera, comme Woerth, débarquée. Tiens, une station-service : Michèle, sois gentille, va donc nous chercher des Kinder… Allez Fillon démarre, démarre !
Cependant, accabler la Mouche se révèle par trop aisé, et ne saurait nous faire oublier que madame Royal, à la suite de sa campagne de 2007, était partie « se ressourcer », où donc ? En Tunisie, que Strauss-Kahn fut décoré par Ben Ali himself le 18 novembre 2008, et qu’il vanta alors le modèle tunisien, « meilleur modèle à suivre pour les pays émergents ». Sic. Et Sarko, quand on y repense : c’est à Louxor que le gars avait pris ses premières vacances en compagnie de Carla et de toute la smala, aux frais de Bolloré, son copain milliardaire. Force est donc de constater qu’Égypte, Tunisie, « destinations prisées » des Français qui ont les moyens – et pas de cerveau –, fut aussi, de long temps, celles du personnel politique. On apprendrait que Krivine coule une retraite heureuse en compagnie d’Arlette L. du côté de Charm el-Cheikh qu’on en serait pas plus étonné.
En France, pendant ce temps, quoi en France ? La routine pépère, si ce n’est ces Compagnies Républicaines de Sécurité en grève de la faim, pas en grève de la Kronenbourg : ils n’auraient jamais tenus trois jours. « On est une famille CRS ! », beuglait l’autre jour l’épouse d’un de ces fourbus militaires qui refusent – on aura tout vu ! – désormais de déménager. Famille CRS : me vint alors à l’esprit l’image des petiots, de la môman, de la mamie, des frères et des sœurs, tous bien uniformés matraques et casques en sursis… Pour me débarrasser de l’image enquiquinante j’allais pour m’en rouler un petit quand la ministre des Sports, Chantal Jouanno qu’elle s’appelle, s’est invitée dans le poste afin de donner son avis sur un sujet que, visiblement, elle ne connait qu’imparfaitement : « Quand on voit les dégâts que fait le dopage dans le sport, on ne peut qu’être contre la légalisation du cannabis », a dit la madame, sans rire. J’ai donc revêtu mon jogging flambant neuf, et je suis parti dormir.