Non à la flikiatrie

mis en ligne le 26 mai 2011
Les nouvelles lois sécuritaires et de remise en cause de la loi de 1990 stigmatisent les malades en les désignant comme des criminels. Cela rappelle les propos de Sarkozy alors ministre de l’Intérieur quand il affirmait que « tous les malades mentaux sont des délinquants potentiels » – ce qui est absurde. Dans la réalité, les patients traités sont, statistiquement, moins dangereux que la population dite normale. Un déprimé suite au décès d’un proche peut avoir besoin d’un soin psychologique pour faire son deuil. Ce n’est pas un délinquant à dénoncer à la police pour le ficher.
On caricature le patient en psychiatrie qu’il faudrait enfermer, alors que l’hospitalisation sous contrainte ne concerne qu’un faible pourcentage de patients qui avaient la possibilité d’un recours auprès du procureur s’ils estimaient qu’ils ne relevaient pas de mesure de contrainte. La sortie d’essai de soin sous contrainte permet au patient de retrouver son domicile et d’être suivi lors d’un traitement ambulatoire. C’est le rôle symbolique de la loi qui se fait dans la relation et évite des ruptures de prise en charge avec rechutes et hospitalisations. Mais la plupart des patients sont en hospitalisation libre ou suivis librement en ambulatoire. Pour cela, il y a des consultations médicales, psychologiques, sociales, infirmières en centres médico-psychologiques, des visites à domicile pour aider certains patients quant à leur autonomie, aux gestes de la vie quotidienne, des foyers de post-cure, des centres d’accueil thérapeutique à temps partiel où les patient peuvent avoir des activités créatrices et des relations sociales, des centres d’accueil et de crise pour les patients présentant un épisode aigu. Mais toutes ces structures intermédiaires sont menacées par la destruction du service public qui les supprimera par manque de moyens et d’effectifs, réduction budgétaire oblige.
Ne resteront que des consultations pour une « chimiatrie » et un hôpital transformé en prison. Le soignant fera du gardiennage, alors que ce n’est pas son rôle. C’est la disparition du soin. Le recours à un juge des libertés et de l’application des peines pour décider de l’hospitalisation sous contrainte met sur le même plan hôpital et prison, maladie et conduite délictuelle, où la notion d’ordre public remplace l’abord clinique de la pathologie. C’est une menace sur la diversité thérapeutique qui ne se limite pas au médicament, même si celui-ci peut soulager le patient en souffrance psychique. On oublie trop souvent que le patient souffre de sa pathologie. On oublie aussi que certains patients, en phase aiguë, peuvent être dangereux pour autrui, mais aussi pour eux-mêmes. Le soin vise à protéger le patient des conséquences de sa pathologie.
L’hôpital-prison sera vite plein, avec parfois un amalgame entre maladie et délinquance, ce qui n’est pas la même question ni la même solution. La délinquance et la violence sont des questions sociales. Le résultat est un hôpital plein avec un turn-over incessant des patients, un manque de place pour hospitaliser librement des patients en phase aiguë, une absence d’alternative à l’hospitalisation. Les patients les plus pauvres n’auront droit qu’à un service public réduit au soin minimum. Or la plupart des patients souffrent des conséquences sociales de leur maladie et disposent de peu de ressources. Les riches, eux, iront dans le privé qui voit son marché, et son profit, augmenter. C’est la « friciatrie » privée.
C’est un des signes de la dérive paranoïaque et fasciste de l’État en période de crise du capital, alors que la crise est due à l’existence même du capitalisme. Mais là-dessus, pas un mot…



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


19172Pitor

le 28 juin 2011
C’est dramatique et en même temps tellement logique ! Nous sommes les témoins d’une société qu’on désagrège. Cette disposition n’a pour objectif que d’infléchir encore plus la société à la servilité, à la soumission à moindre frais ! S’éloignant de plus en plus des valeurs de solidarité et de fraternité, c’est la loi de plus fort qui prime (mais ici ce seront les plus serviles, les plus soumis qui survivront).
La faiblesse quelle qu’elle soit selon les nouveaux critères (le discernement, la révolte, la pauvreté, la « folie » et quoi d’autres encore demain ?) devient objet d’anathème, devient condamnable. Les faibles deviennent les boucs émissaires de la société (reconnaissance de leur culpabilité) pour la cohésion sociale !
Avilissante démagogie dont le seul objectif est de servir un pouvoir basé sur le profit, l’enrichissement, l’exploitation à outrance des individus.
L’Histoire récente nous avait déjà donnée une idée de jusqu’où pouvait-on aller dans la négation de la différence à des fin politiciennes : Les Nazis (dont les Responsables n’avaient guère d’autres objectifs finalement que ceux des Politiques aujourd’hui, l’enrichissement personnel, le pouvoir) n’avaient-ils pas commencé par jeter l’opprobre sur certaines catégories d’individus les désignant soit comme ennemis soit comme impropre ? Exactement comme aujourd’hui !
L’Histoire est une monstrueuse répétition qu’il est plus que temps de casser en détruisant ce qui l’alimente !