Gros mensonges

mis en ligne le 1 décembre 2011
Jusqu’à il y a quelques années, on pensait bêtement que les cataclysmes qui nous tomberaient dessus seraient climatiques et/ou nucléaires. Dans un système où la majorité des gens a été conduite à l’individualisme, ça a entraîné encore plus d’enfermement chez soi, à regarder à la télé les cataclysmes, à rentrer la tête dans les épaules pour éviter de se prendre des déluges et à commander sur internet pour ne plus avoir à sortir mais consommer quand même.
Et voilà que LA crise est arrivée, la crise des subprimes, la crise des banques.
Et désormais les annonces cataclysmiques, les plans d’austérité (appelé à tort « plan de sauvetage de l’euro ») tombent quasi quotidiennement.
La crise arrive à point nommé pour faire avaler les pilules de la mondialisation capitaliste et financière. Sarkozy l’a dit : « La crise va créer beaucoup de souffrance mais ce peut être une opportunité pour notre pays de prendre des mesures qu’il n’aurait jamais acceptées. » C’est aussi pour ça que Fillon a annoncé, le 7 novembre dernier, un plan de rigueur à faire pâlir les gouvernements de droite et de gauche qui s’y étaient essayés en France depuis une trentaine d’années. Le Premier ministre a expliqué que s’il était hors de question de faire payer les riches et de faire payer les banques, il était incontournable que ce soient les salariés et les pauvres qui trinquent.
La dette sert de prétexte à un plan de régression sociale comme on ne l’avait jamais vu. Pour l’essentiel, les cadeaux faits aux banques et aux patrons vont être payés par le travail des salariés, par une plus grande précarité, par du chômage et du serrage de ceinture : coupes dans les budgets des services publics et de la Sécurité sociale, avancement du timing pour l’application de la limite de 62 ans pour prendre sa retraite, gel du barème de l’impôt sur le revenu – ce qui entraînera une hausse des impôts –, augmentation de la TVA, etc. Pire, même, le gouvernement s’en prend aux salariés malades, potentiellement « fraudeurs » et « responsables des déficits publics » et, en instaurant un jour de carence de plus dans le privé et un dans la Fonction publique, il tente d’opposer les uns aux autres. Pendant ce temps-là, le patronat et les actionnaires rigolent et se trouvent épargnés.
Pour faire avaler la pilule, l’État brandit le spectre de la Grèce, comme cible à ne surtout pas atteindre. Fillon a même cité l’année 1945 pour en rajouter une couche, alors qu’on est tellement loin d’un pays dévasté où plus rien ne fonctionnait.
La crise de la dette n’est qu’un prétexte pour attaquer de front les classes les plus pauvres. Dans d’autres pays européens, les gens se bougent, manifestent, pour le moins. En Grèce, au Portugal, il est hors de question de se laisser tondre la laine sur le dos sans réagir.
En France, pas grand-chose. La période électorale y est pour quelque chose et les médias font tout pour nous amuser avec ce cirque. Pourtant, plus personne n’est dupe et tout le monde sait très bien que le résultat n’entraînera qu’une quantité plus ou moins importante de vaseline pour nous faire passer les mauvais coups.
Comme le disent les camarades de la CNT : « Seule la mise en place d’une riposte syndicale mobilisant la majorité de la population pourra imposer d’autres choix économiques. » Sauf que ce n’est pas de là non plus que ça semble venir.
Le 18 novembre, à l’initiative de la CGT, cinq organisations syndicales ont appelé à une semaine d’action pour interpeller le gouvernement, avec un moment fort le 13 décembre. Il est question de « rassemblements » et même pas de manifs, et encore moins de grèves. Comme me le disait un copain syndicaliste : « C’est fichu. »
Bernard Thibault a déclaré que le « mouvement syndical devait affirmer sa fermeté et sa détermination ». C’est, encore une fois, pas comme ça que ça va le faire. Une intersyndicale qui veut rester unie ne peut déboucher que sur ce type d’action où chercher le plus petit dénominateur commun pour faire ensemble n’amène plus nulle part.
Reste à s’indigner davantage, à se mettre en colère plus, à chercher tous les moyens pour devenir efficaces ensemble. Ce n’est certes pas facile aujourd’hui, mais on n’a pas d’autres choix.