Autonomie syndicale ?

mis en ligne le 23 février 2012
C’était il y a longtemps. Bien plus que ce que l’on appelle aujourd’hui le siècle dernier ou presque. Selon les concepts de Lénine (et d’autres !), le mouvement ouvrier était un enfant que les « adultes » – entendez par là les partis ouvriers – devaient mettre dans le droit chemin. Autrement dit, il devait se restreindre à être un marchepied pour l’accession à la conquête de l’État pour les tenants, tous azimuts, du socialisme par la voie parlementaire. Les « pauvres ouvriers syndiqués » n’étaient capables que d’accéder à un syndicalisme corporatif qui se résumait à améliorer le quotidien de la classe ouvrière. Pour le grand soir, il fallait voir autre part, du côté de l’avant-garde éclairée autoproclamée du prolétariat !
Quand on consulte les archives du mouvement ouvrier, on constate que, dans le mouvement syndicaliste de l’entre-deux-guerres, ceux qu’on déclarait à l’époque « réformistes » avaient au moins le sentiment ancré en eux que le syndicalisme devait être indépendant de toute visée politique. La suite a montré qu’une autre tendance avait pris les choses en mains.
À la Libération, de manière « caricaturale », la CGT mettait ses pas dans ceux du Parti communiste et Force Ouvrière oscillait entre tendances droitières et grèves. L’après-1968, quant à elle, avait vu émerger une autre voie avec une jeune CFDT qui, dans les discours, se réclama un temps de l’anarcho-syndicalisme…
Edmond Maire, secrétaire à l’époque de l’organisation syndicale, reprit les choses en mains en inventant le concept de l’« autonomie engagée », histoire de soutenir le PS. Quarante ans après, c’est le secrétaire annoncé sortant de la CGT qui nous refait le coup !
Le nouveau truc – « une CGT indépendante mais pas neutre » – ne fait pas recette. Cela a pourtant été annoncé via une interview à la NVO, magazine hebdo de la confédération sise à Montreuil. La CGT aurait-elle « décidé de se mêler de la campagne présidentielle » ? Non, déclare Bernard Thibault car « la CGT n’a pas de candidat à l’élection présidentielle. Nous sommes un syndicat qui réunit des adhérents et sympathisants de diverses sensibilités politiques ». On connaît la chanson. Si l’actuel locataire de l’Élysée est renvoyé à ses études, il faudra sûrement mettre la pédale douce sur les revendications et les grèves ? À nous toutes et tous d’affirmer quotidiennement l’indépendance du syndicalisme !