Exploité, licencié, non payé et arrêté !

mis en ligne le 26 avril 2012
Les forces régaliennes de l’État, on le sait déjà, ne rechignent pas à l’odieuse tâche qu’est la chasse aux sans-papiers. Les perdreaux et la bleusaille nous offrent régulièrement le spectacle de l’exercice de leur art sans cesser de nous retourner les tripes et d’augmenter notre révolte. Cette fois, le 11 avril, c’est dans les murs du conseil de Prud’hommes de Nanterre que l’immonde flicaille est venue se livrer à l’arrestation de Monsieur K., Malien, à sa sortie de l’audience de conciliation.
Ce travailleur, licencié d’une entreprise de restauration collective dans laquelle il travaillait depuis 2010, avait assigné son employeur pour réclamer devant le conseil le paiement de ses indemnités légales.
En personne avisée apprenant qu’une procédure prud’homale était entamée contre lui, l’employeur a porté plainte contre Monsieur K. pour usurpation d’identité et a ensuite prévenu la police du jour et du lieu de la convocation à l’audience pour lui faciliter l’arrestation.
Accablant qu’il n’existe pas de communiqué de protestation de la part des organisations syndicales des Hauts-de-Seine dont sont issus les conseillers de Prud’hommes et de Prud’femmes salariés. Pas plus qu’il n’existe de protestation du conseil de Prud’hommes de Nanterre ni du président de la cour d’appel auprès du préfet. Des lacunes qui, gageons-le, devraient se corriger… Si la conscience et la volonté frappaient à leur porte.
À l’heure où j’écris ces lignes, il semble que Monsieur K. a fait l’objet d’un rappel à la loi dans un commissariat des Yvelines (?) au bout d’une garde à vue de plusieurs heures. En attendant, très certainement, l’expulsion du territoire.
Comme le dénonce le communiqué commun (LDH, Gisti, SM, SAF, Adde) 1, il est certain que le zèle des chaussettes à clous les amenant à interpeller quelqu’un dans l’enceinte même d’un conseil de Prud’hommes est une première et cela constitue, ainsi, une nouvelle étape dans l’insécurité faite aux travailleurs et travailleuses sans-papiers dans ce pays.
La police montre qu’elle est toujours prête à se livrer aux exactions les plus basses, y compris dans un tribunal où elle n’était pas requise.
De même qu’un employeur se préserve du risque causé par son salarié qui recourt aux Prud’hommes pour faire valoir ses droits est en soi une « première ». Mais, cela dit tout sur les vertus morales du capitalisme et sa logique d’exploitation salariale.
Quant à l’employeur, le sol des cuisines de restauration est souvent très glissant, et si, lors d’une visite, il venait à plonger malencontreusement dans une friteuse, l’humanité ne sourcillerait pas.
Si un incendie social de grande ampleur venait un jour, faudrait pas qu’à nouveau de bons esprits naïfs s’étonnent et s’horrifient qu’une une rage profonde face apparaître quelques têtes sur des piques ou suspendent des crapules à la lanterne dans les ghettos de Neuilly ou de Villa Montmorency.

Tsinapah






1. LDH, Ligue des droits de l’homme ; Gisti, Groupe d’information et de soutien des immigrés ; SM, Syndicat de la magistrature ; SAF, Syndicat des avocats de France ; Adde, Association des Avocats pour la défense des droits des étrangers.