Jacques Blaize nous a quittés

mis en ligne le 6 juin 2013
Jacques Blaize était né le 12 juillet 1941 à Saint-Maur (Val-de-Marne). Anarcho-syndicaliste, militant puis permanent à la CFDT, chargé de recherche. Il vécut dans le Val-de-Marne de 1968 à 1984. Ses parents étaient d’origine ouvrière. Il était marié avec Ginette Bertheau, née en 1940 à Saint-Maurice (Val-de-Marne), qui fut secrétaire administrative dans des associations et des syndicats. Après des études de mathématiques et d’économie à l’université de Paris […] entre 1959 et 1966, il fut embauché comme chargé de recherche opérationnelle d’abord chez Brampton-Renold (1966-1968), puis à L’Express (1969-1971) et enfin chez Buitoni (1971-1978). Ensuite, il fut permanent à la CFDT de 1978 à 1984 avant de rejoindre l’AFME (Agence française de maîtrise de l’énergie) de 1984 à 1988. Son engagement comme militant anarchiste et anarcho-syndicaliste fut le résultat, d’une part, de lectures, de la lutte contre la guerre d’Algérie et de quelques rencontres avec des militants de la Fédération anarchiste, d’autre part, de son adhésion à la FEN en tant que pion et chargé de cours dans un lycée entre 1960 et 1966 et de contacts avec des militants du « courant E » (École émancipée) et, bien sûr, de sa propre militance post-Mai 68 à la CFDT.
Le parcours militant de Jacques Blaize se fit essentiellement au sein de la CFDT où il exerça de nombreuses responsabilités. Il rejoignit cette organisation en 1968, ce qui lui valut d’être licencié pour activités syndicales […]. De 1971 à 1978, il milita à la Fédération Alimentation et surtout à l’UD-CFDT 94. C’est à cette période qu’il adhéra formellement à l’Alliance syndicaliste révolutionnaire et anarcho-syndicaliste (Asras). […] Il était alors au bureau de l’Union départementale 94 (1972-1984), secrétaire du syndicat de l’alimentation du Val-de-Marne (1974-1978) qui devint pour un temps le premier syndicat de l’UD en termes numériques grâce à la pratique syndicaliste démocratique et libertaire qu’il impulsa, et membre du conseil fédéral (1974-1978) où il assuma et défendit des positions anarcho-syndicalistes qu’il présenta explicitement au bureau fédéral en 1975 […]. En 1978, il quitta la Fédération de l’alimentation pour assurer le mandat de secrétaire général de l’UD-CFDT 94 qu’il représenta au bureau de l’Union régionale parisienne (URP) CFDT. […]. Il fut alors considéré […] comme le « leader » de l’opposition régionale, mais il refusa en 1984 de se présenter comme secrétaire général avec « l’appui » (sic) des trotskistes et d’anciens maoïstes. Jacques Blaize, dans la tradition anarcho-syndicaliste des Bourses du travail, resta toujours très attaché à la dimension interprofessionnelle du syndicalisme qui assure des contacts horizontaux entre les travailleurs et leurs syndicats. L’interpro à ses yeux protège « des tentatives de division et de l’émergence d’une ‘‘aristocratie’’ ouvrière avant-gardiste ».
Il participa à tous les congrès UD-CFDT 94 entre 1972 et 1984 où il défendit la position fédéraliste qui consiste à rappeler que les positions fédérales régionales ou confédérales peuvent ne pas être appliquées par les structures de base à condition de ne pas attaquer publiquement lesdites structures […]. Au congrès de la Fédération de l’alimentation en 1974, entre les deux tours de l’élection présidentielle, il défendit la position selon laquelle le syndicalisme n’avait pas à soutenir quelque candidat que ce fût, contre l’avis d’Edmond Maire qui lui déclara qu’il aurait des comptes à rendre à la classe ouvrière […] ! Pour lui, l’UD 94 et l’opposition confédérale qu’il animait, « le syndicalisme est […] un outil de mobilisation des travailleurs pour mener la lutte, car c’est bien elle le moteur des transformations ».
Parmi les multiples activités militantes de Jacques Blaize, il convient de rappeler son rôle dans l’animation et l’organisation, en 1978, de la grève des ouvrières et ouvriers de la biscuiterie Azur à Vincennes ; durant le conflit, la production autogérée fut relancée pour soutenir la lutte, un peu dans l’esprit des Lip : « On produit, on se paye. ». Cette grève gestionnaire fut alors activement soutenue par les militant.e.s de l’Asras et violemment combattue par la CGT (absente de la boîte) qui arriva à torpiller la lutte en proposant de se partager le produit de la vente pour les fêtes de Noël. Après son départ de Paris en 1984, Jacques Blaize demeura toujours adhérent CFDT […] qu’il quitta définitivement après le « discours » télévisé de Kaspar expliquant qu’il laissait la place à Nicole Notat. Cette manœuvre lui rappelait par trop les pratiques politiques en vigueur en URSS lors des grands procès staliniens. Il fut licencié de l’AFME en 1988, probablement à la suite d’une interview « accordée » à un canard local, La Galipote [...]. Depuis, il a eu quelques activités militantes dans des associations plus ou moins écologistes et a participé aux émissions d’une radio locale, Radio arverne, sur la maîtrise de l’énergie et la décroissance. Il était adhérent au syndicat des retraités Solidaires.
Jacques Blaize est décédé le 24 mai 2013 à Clermont-Ferrand où il a été incinéré le 28 du même mois.



Source : témoignage direct, novembre 2008, extrait (à paraître) du Dictionnaire biographique du mouvement libertaire francophone, Éditions de l’Atelier, 2014.