Autorité et liberté : l’anarchie et le problème du politique

mis en ligne le 12 septembre 2013
Dans le nécessaire et difficile redéploiement que les libertaires doivent réaliser pour progresser, et avec eux leurs idées et leur influence, il est un monde qui peut nous sembler hermétique à l’anarchisme : celui de la communauté universitaire. Et pourtant, ce début d’année universitaire 2013 nous propose deux colloques prometteurs, l’un à Tours les 26 et 27 septembre, l’autre à Montpellier les 10 et 11 octobre 1 qui traitent de problématiques abordées à partir de l’anarchisme. Il est intéressant de noter d’ailleurs que ces deux colloques doivent beaucoup à des personnes et des sujets très liés à l’Amérique latine…
Jorge Cagiao y Conde (Université François-Rabelais de Tours) nous décrit le point de départ de ce premier événement : « C’est l’aboutissement d’une collaboration avec mon collègue Alfredo Gómez-Müller avec qui je travaille sur des questions en rapport avec l’anarchie, moi plus du côté proudhonien – je fais partie du bureau de la Société Pierre-Joseph Proudhon –, et Alfredo a plus travaillé sur les pratiques autogestionnaires et l’anarchisme en Amérique latine. Il y a donc à la fois l’envie de travailler sur un intérêt commun et l’envie de réaliser un événement qui puisse rassembler à Tours un certain nombre de spécialistes du droit, des sciences politiques, de la sociologie, etc., afin d’essayer de balayer un peu le sujet – sans l’épuiser naturellement – et présenter déjà une première réflexion sur la question. »
À partir de l’idée que l’anarchisme a ses caractéristiques propres dans l’histoire des idées politiques et sociales quant à ses conceptions radicalement critiques du pouvoir politique étatique, les participants à ce colloque aborderont les tensions générées par des épisodes historiques ou des écrits et qui montrent que la gestion du pouvoir pourtant détesté pouvait être utilisée (par exemple, la Commune de Paris, la participation des anarchistes au gouvernement catalan en Espagne républicaine). Au-delà des appréciations des uns et des autres sur ces situations (« trahisons », « inanité des conceptions anarchistes »), il reste que les enjeux politiques posés par les anarchistes demeurent.
Et que ces apparentes contradictions des anarchistes sont plutôt « comme le symptôme d’un problème général qui touche au sens du politique comme tel, et dont on peut trouver une expression dans la crise contemporaine des formes établies de démocratie représentative et de la notion même de représentation politique, ainsi que dans l’émergence récente de nouvelles formes d’action publique – Indignados, Occupy, certaines formes de l’altermondialisme qui mettent en question la pratique politique en tant que pratique spécialisée et professionnelle reproduisant les hiérarchies instituées et les systèmes verticaux de prise de décision ou engendrant de nouvelles hiérarchies qui échappent dans une large mesure au contrôle social ».
Cette manifestation sera découpée en quatre demi-journées 2. D’abord, « Lectures de l’anarchie : culture, politique et droit » se composera de trois contributions portant sur Proudhon, Gustav Landauer et Walter Benjamin. L’après-midi du jeudi se poursuivra par « L’expérience politique de l’anarchisme espagnol ». Le lendemain matin, « La “nature” humaine et le politique : pouvoir, antipouvoir » sera abordé à travers trois interventions dont celles de Philippe Pelletier et d’Anselm Jappe (« Un anarchiste sur le trône du tsar, que ferait-il ? Des différentes conceptions de la “nature humaine” dans la pensée anarchiste »). Enfin, en conclusion, sera traité le sujet de « Articulations politiques de l’anarchie » où Jorge Cagiao y Conde, par exemple, abordera « L’organisation juridique et territoriale de l’anarchie. Une théorie de la fédération ? » et Guillaume Rey parlera de « Des dieux, des chefs et des lois : “sociétés sans états” et anarchisme en Afrique ».
Mais à qui s’adresse ce colloque ? Ses initiateurs répondent sans hésiter : « Notre engagement c’est que nos étudiants puissent venir et participer, échanger et débattre, et c’est un colloque qui est ouvert à la société civile ; nous espérons donc que les curieux et les gens déjà intéressés à la question viendront aussi. » Il s’agit donc bien de toucher un public large, puis de faire paraître les actes du colloque, et d’intéresser aussi la communauté universitaire à ces sujets en aidant à l’émergence de ces questionnements en son sein.








1. Nous aurons bientôt l’occasion de revenir sur ce colloque « Amérique(s) anarchiste(s) : expressions libertaires du XIXe au XXIe siècle ».
2. Vous pouvez obtenir le programme complet et détaillé en écrivant à : cagiao (arobase) univ-tours.fr
Le colloque se tiendra à partir de 9 heures à la Bibliothèque universitaire de Tours, 5e étage, 3 rue des Tanneurs. Entrée libre.