Météo syndicale

mis en ligne le 4 juillet 2013
« Le syndicalisme, a proclamé le congrès d’Amiens en 1906, se suffit à lui-même. » Cette parole, je le sais, n’a pas toujours été bien comprise, même des anarchistes ; que signifie-t-elle cependant sinon que la classe ouvrière, devenue enfin majeure, entend enfin ne plus laisser à personne le soin de sa propre émancipation. Quel anarchiste pourrait trouver à redire à ce projet que défendait le jeune Pierre Monatte au congrès international anarchiste d’Amsterdam (séance du 28 août 1907 au soir) ? Il s’attira une réponse du vétéran de l’Internationale, Malatesta, qui lui répliqua que l’anarchie était le but suprême (sa réponse étant toutefois plus nuancée que divers écrits anarchistes de l’époque, hostiles au syndicalisme).
Au début du siècle dernier, la notion de retraite n’existait pas. Lorsque les pouvoirs publics l’ont instituée, elle fut fraîchement reçue par le monde syndical. La retraite était surnommée en ce temps-là la « prime à la mort », l’âge de son obtention correspondant à l’espérance de vie d’un ouvrier. Aujourd’hui, au niveau européen, le monde du travail français est montré du doigt et vu comme étant grognon, indiscipliné et profiteur… Sous prétexte que le monde d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier, et que l’espérance de vie a augmenté, il faudrait passer à la moulinette les acquis sociaux et se plier à la loi des marchés qui, elle aussi, évolue sans cesse. À la dernière conférence sociale, on nous a refait le coup de « tout le monde est dans le même bateau ». Les conquêtes du mouvement ouvrier devraient faire place à une modernité pleine d’avenir.
La ministre des Affaires sociales a souligné la semaine dernière les « points de consensus lors de la conférence sociale notamment sur la retraite », mais, selon elle, « il faut travailler à présent en vue de propositions du gouvernement à la rentrée ».
Tout est géré à la sauce bruxelloise, sous influence yankee ; par exemple, la filière porcine française. Celle-ci périclite, concurrencée par les abattoirs allemands qui pratiquent des bas salaires et surexploitant des travailleurs d’Europe de l’Est, voire de Grèce ou d’Espagne ! Selon le secrétaire du syndicat allemand de l’industrie alimentaire NGG de la région de l’Oldenbourg, les conditions de travail « s’apparentent à une forme d’esclavage moderne ».
Des salaires compris entre un et dix euros de l’heure, des travailleurs tous logés dans des préfabriqués… Tout ça provoque, de plus, des dégâts sociaux dans les pays limitrophes. Le gouvernement français la ferme. Les différents ministères du Travail en Europe ont du pain sur la planche, mais quand des profits énormes sont en jeu… le droit du travail doit se taire.
Pour ce qui est des résultats des conférences sociales, ça doit servir de vaccin en vue des vacances ? À la rentrée, on verra si c’est du lard ou du cochon !