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Littérature
par Sylvain Boulouque • le 22 mars 2022
Vox populiste
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Thomas Frank est un journaliste américain qui depuis plusieurs années tente de mettre à nu les évolutions de la société états-unienne. Après deux ouvrages décapants publiés sous le titre Pourquoi les pauvres votent à droite ? et Pourquoi les riches votent à gauche ? (Agone 2008 et 2018), il se penche sur une autre question frontale le rapport des élites au peuple. Il analyse l’expression et le détournement du mot populisme, traduit de l’anglais « populist ».
L’expression populiste n’est pas propre à l’Amérique, elle était utilisée quelques années auparavant en Russie. Les populistes « narodniki », « ceux du peuple » ces socialistes russes se rendant dans les campagnes pour aider et se fondre dans le peuple. Aux États-Unis, les premières mentions du mot sont utilisées par le Parti du peuple fondé en 1892. Le Parti dénonçait les « pops », les profiteurs reprenant les termes même de la constitution américaine « Nous le peuple américain », revendiquant fièrement l’étiquette populiste n défendant les intérêts du peuple. Ce parti réclamait la réglementation des monopoles, la nationalisation des services publiques, l’impôt sur le revenu. Très vite, ce parti implose sous le jeu des fractions, une partie des militants rejoignant le mouvement libertaire américain. Ce que souligne Thomas Franck est que ce parti est dénoncé par les dirigeants, les considérant comme totalement irresponsable. Le parti du peuple est alors désigné par les autres partis politiques de « bigot ». Initialement, ce qualificatif est péjorativement utilisé pour désigner le parti populiste comme des « doctrinaires » – le terme évolue ensuite pour qualifier les racistes. Très vite dans la classe possédante, l’expression de populiste est utilisée pour désigner ceux qui se refuse à leur expertise sous entendant par ailleurs, qu’il s’agit d’une « classe sous instruite ». Elle revient comme une ritournelle et parfois même de manière surprenante quand le Président américain promoteur du New-Deal, Franklin Roosevelt propose la mise en œuvre d’une politique économique procédant à une redistribution partielle des richesses, alors que les experts institutionnels lui déconseillait de verser dans le populisme. L’histoire bégayant parfois, dans les années 1960, les étudiants se trouvent également taxés de populiste. L’originalité est alors que les mouvements sociaux, fusionnant les revendications ont pour certains rédigés des manifestes populistes en réactivant le mythe fondateur de 1892 et rejetant l’expertise au service de l’élite. Laquelle a qualifié par la suite les nationalistes démagogues, comme Trump et ses séides, qui contrairement aux populistes originelles qui voulaient une expertise au service du peuple ont érigé l’ignorance et la bêtise en dogme mais se réappropriant le terme.
Un ouvrage rondement mené et fort bien construit sur les origines d’un mot, comme quoi la bataille politique peut être aussi sémantique.
Sylvain Boulouque
Thomas Franck
Le populisme voilà l’ennemi
Agone 2021 408 p. 24 €
L’expression populiste n’est pas propre à l’Amérique, elle était utilisée quelques années auparavant en Russie. Les populistes « narodniki », « ceux du peuple » ces socialistes russes se rendant dans les campagnes pour aider et se fondre dans le peuple. Aux États-Unis, les premières mentions du mot sont utilisées par le Parti du peuple fondé en 1892. Le Parti dénonçait les « pops », les profiteurs reprenant les termes même de la constitution américaine « Nous le peuple américain », revendiquant fièrement l’étiquette populiste n défendant les intérêts du peuple. Ce parti réclamait la réglementation des monopoles, la nationalisation des services publiques, l’impôt sur le revenu. Très vite, ce parti implose sous le jeu des fractions, une partie des militants rejoignant le mouvement libertaire américain. Ce que souligne Thomas Franck est que ce parti est dénoncé par les dirigeants, les considérant comme totalement irresponsable. Le parti du peuple est alors désigné par les autres partis politiques de « bigot ». Initialement, ce qualificatif est péjorativement utilisé pour désigner le parti populiste comme des « doctrinaires » – le terme évolue ensuite pour qualifier les racistes. Très vite dans la classe possédante, l’expression de populiste est utilisée pour désigner ceux qui se refuse à leur expertise sous entendant par ailleurs, qu’il s’agit d’une « classe sous instruite ». Elle revient comme une ritournelle et parfois même de manière surprenante quand le Président américain promoteur du New-Deal, Franklin Roosevelt propose la mise en œuvre d’une politique économique procédant à une redistribution partielle des richesses, alors que les experts institutionnels lui déconseillait de verser dans le populisme. L’histoire bégayant parfois, dans les années 1960, les étudiants se trouvent également taxés de populiste. L’originalité est alors que les mouvements sociaux, fusionnant les revendications ont pour certains rédigés des manifestes populistes en réactivant le mythe fondateur de 1892 et rejetant l’expertise au service de l’élite. Laquelle a qualifié par la suite les nationalistes démagogues, comme Trump et ses séides, qui contrairement aux populistes originelles qui voulaient une expertise au service du peuple ont érigé l’ignorance et la bêtise en dogme mais se réappropriant le terme.
Un ouvrage rondement mené et fort bien construit sur les origines d’un mot, comme quoi la bataille politique peut être aussi sémantique.
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PAR : Sylvain Boulouque
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